samedi 22 janvier 2022

DOXOGRAPHIE DE LA DIALECTIQUE



« Il est possible que je me sois mis dans l'embarras. Mais avec un peu de dialectique, on s’en tirera toujours. J’ai naturellement donné à mes considérations une forme telle qu’en cas d'erreur, j’aurais encore raison. [Es ist möglich, daß ich mich blamiere. Indes ist dann immer mit einiger Dialektik zu helfen. Ich habe natürlich meine Aufstellungen so gehalten, daß ich im umgekehrten Fall auch Recht habe]. » Karl Marx, lettre à Friedrich Engels, 15 août 1857.
Jean Wahl : « MATÉRIALISME DIALECTIQUE

  Deux beaux mots. Le premier fait appel à une forme de l’entendement révolutionnaire, à l’instinct de "honte arborée", et le deuxième à l’orgueil. De sorte que le snobisme à rebours et le rebours tout court trouvent à la fois leur compte. Mon premier est ce qu’il y a de plus bas. Mon second est ce qu’il y a de plus haut. Reste à savoir si mon tout n’est pas un attrape-nigauds. » (" Satire ", Nouvelle Revue Française, juin 1938). 

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   Parmi les conséquences dans les différents domaines de la philosophie de la sociologie de la connaissance, ou sociologie de la culture, qui considère l'objectivité scientifique comme relevant du sociologique ou de l’historique plus que du logique, on pense à l'opposition entre l'histoire dite bourgeoise et le matérialisme historique, à la science prolétarienne opposée à la science bourgeoise, puis à un dualisme logique. La dialectique marxiste, qui admet et promeut le contradictoire, l’identité des contraires (renouvelant la coïncidence des opposés du théologien allemand du XVe siècle Nicolas de Cues), le raisonnement circulaire, et que Lénine appelait, a-t-on dit,  " l'algèbre de la révolution ", est opposée à la logique classique qui exigeait et exige toujours la non-contradiction.

   En 1947, Jean Kanapa opposait le « rationalisme des Facultés de philosophie, confit, desséché et momifié, simple précepte épistémologique » à pas moins que le « rationalisme total, vivant, dialectique ». Mais Staline finit par être obligé, vers 1950, de réintroduire l'enseignement universitaire de cette logique classique. Dualisme biologique aussi, au moins le temps que dura la renommée de Mitchourine et Lyssenko, négateurs de l'hérédité. Quant au dualisme linguistique, un temps envisagé, il fut écarté, en 1950, par l'указ de Staline : la langue n'est pas une superstructure, elle n'émane pas de la bourgeoisie – mais une « guerre du genre des mots » se trouve pratiquée par le mouvement PC (politically correct), notamment par ses composantes féministe et homosexuelle, cette dernière s’incarnant actuellement dans une " Interassociative lesbienne, gaie, bi et trans (Inter-LGBT) ", annonciatrice des LGBTQQIA+. Enfin, on assiste depuis peu à l'émergence d'une inquiétante écriture dite " inclusive " qui réveille ce dualisme.

  La dialectique apparaissait dans la France des années 1950 comme la panacée, la solution des problèmes du monde (un peu à la manière dont la Scientologie de Ron Hubbard présente sa dianétique). Elle se définit tantôt comme une méthode, tantôt comme une logique, mais elle n’est finalement qu’une indigente et inféconde grille de lecture, notamment quand on la compare aux Lois de la pensée de George Boole (1815-1864) et aux travaux semblables de William Stanley Jevons (1835-1882), œuvres quasi contemporaines de celles du militant Karl Marx, et d’où découle toute la science et la technique de l’information. Jean Grenier (1898-1971) décrivait cette dialectique comme « l’illogisme érigé en méthode suprême ». Par ailleurs, des grilles antérieures de bien meilleure qualité que cette dialectique marxiste avaient été avancées sous les dénominations anciennes de genres, catégories ou universaux.

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« La dialectique n'est qu'un savoir logique implicite, qui ne formule aucune de ses lois, et, en tant qu'art du dialogue, elle est parfois plus proche de la rhétorique que de la logique, entendue comme science de la déduction. [...] Les Stoïciens appelaient " dialectique " ce que nous nommons " logique ". » (Jean-Pierre Belna, Histoire de la Logique, chapitre I " La logique grecque ", Paris : Ellipes, 2005)

Genres, catégories, universaux :

Cinq genres platoniciens :
« L’Être, le Repos, le Mouvement, l’Autre, le Même […] il n’y a pas moins de cinq genres […] la nature des genres comporte la communication réciproque. » (Platon, Le Sophiste, 254e-257a).
Cette « communication réciproque », et la présence du Mouvement, répond par avance aux reproches que les marxistes firent à la métaphysique classique (qu’ils ne connaissaient pas) d’ignorer les relations, le contexte, le mouvement.


Dix catégories aristotéliciennes  de l’être : substance, quantité, manière d’être, relation ; endroit, moment, position, équipement, action, passion. » (Aristote, Catégories, IV, 1b)


Quatre catégories stoïciennes : substrat ou substance, qualités stables, manières d’être contingentes et manières d’être relatives (Stoicorum Vetera Fragmenta, II, 369 sqq.)

Sept catégories cartésiennes : esprit, grandeur, repos, mouvement, relation, figure, matière.

Douze catégories kantiennes :
Quantité
unité
pluralité
totalité 

Qualité
réalité
négation
limitation

Relation
inhérence et subsistance
causalité et dépendance
communauté [Causalité d’une susbstance dans la détermination des autres]


Modalité
possibilité – impossibilité
existence – non-existence
nécessité [Existence donnée par la possibilité] - contingence


Deux catégories marxistes : la matière, le mouvement.

Cinq universaux :
Le philosophe néo-platonicien Porphyre de Tyr (vers 234 / vers 305) : le genre, l’espèce, la différence spécifique, le propre, l’accident.


Doxographie :

Héraclite, fragment B 8 : l’opposé est utile, et des choses différentes naît la plus belle harmonie [et toutes choses sont engendrées par la discorde]
B 10 : peut-être la nature se réjouit-elle des contraires et sait-elle en dégager l’harmonie, alors qu’elle ne s’intéresse pas aux semblables ; tout de même sans doute que le mâle se rapproche de la femelle, ce que ne font pas les êtres de même sexe.
B 51 : les hommes ne savent pas comment le différent concorde avec lui-même
B 53 : conflit [guerre, combat] est le père de tous les êtres, le roi de tous les êtres.
B 87 : Un sot à chaque λόγος [mot, argument ou vérité] paraît hébété.

Zénon d’Élée [paidika de Parménide] : Aristote [Sophiste, ouvrage perdu] dit que Zénon fut l’inventeur de la dialectique (Diogène Laërce, L, Vies ..., IX, v, 25 ; voir aussi Sextus Empiricus, Contre les mathématiciens, VII, 7)

L’ancienne dialectique :

Platon, République, VII, 532ab : dialectique : entreprendre par l’exercice du dialogue, sans les sens mais avec la raison, de tendre vers l’être de chaque chose et de parvenir au terme de l’intellection
534b : dialecticien : celui qui est capable de saisir la raison [concept socratique] de l’essence [concept central de la métaphysique des formes] de chaque chose
534e : la dialectique réside au sommet de nos enseignements
536d : la formation propédeutique doit être inculquée avant la formation dialectique
537c : produire une vue synoptique de la parenté des enseignements : épreuve pour distinguer le naturel dialectique de celui qui ne l’est pas ; celui qui peut accéder à une vue synoptique est dialecticien539.

Dialectique : savoir qui appartient aux hommes libres ; division des choses par classes, éviter de croire qu’une classe est une autre, ou qu’une classe différente est identique (Platon, Sophiste, 253cd).

Dialecticien : celui qui sait interroger et répondre (Cratyle, 390c)

Phèdre, 261d : technique de l’Éléate Palamèdes [Zénon d’Élée] capable de donner [aux] auditeurs l’impression que les mêmes choses étaient à la fois semblables et non semblables, unes et multiples, en repos et en mouvement.

Ménon, 75d : manière dialectique : faire usage de ces éléments que la personne questionnée dit connaître.

Dialegesthai : controverser afin d’arriver à un accord sur un sens. Mais la langue devient la pire des choses (Ésope) lorque l’on bavasse sans se soucier du sens des mots, ou en jouant sur leur sens.


Aristote : Rhétorique, dialectique, analytique

Les substances n’ont pas de contraires (Catégories, V, 3b25). Aristote critique par avance la nouvelle dialectique marxiste.

La dialectique procède par interrogations ; elle n’est concernée par aucune classe d’objets. (Seconds analytiques, I, 77a)

Il est impossible pour le même attribut d’appartenir et de ne pas appartenir à la même chose et dans la même relation. (Métaphysique, Γ (IV), 1005b20).

Des propositions contradictoires relatives à un sujet ne peuvent être vraies (Sur l’interprétation, XII)

« L’invraisemblable est vraisemblable » : ce qui produit la duperie, c’est que l’on n’ajoute pas : dans quelle mesure, sous quel rapport, de quelle manière. Rhétorique, 1402a13.

La vie est dans le mouvement. (De anima, I, 2)


Commentaire d'Henri Bergson :
« Un Platon, un Aristote adoptent le découpage de la réalité qu’ils trouvent tout fait dans le langage : « dialectique », qui se rattache à διαλέγειν, διαλέγεσθαι, signifie en même temps « dialogue » et « distribution » ; une dialectique comme celle de Platon était à la fois une conversation où l’on cherchait à se mettre d’accord sur le sens d’un mot et une répartition des choses selon les indications du langage. »

Diodore d’Iasos (-IVe / -IIIe siècle) : toute proposition est, en vertu du principe du tiers exclu, vraie ou fausse.

Chrysippe de Soles (-IIIe siècle) : Contre ceux qui pensent que ce qui est faux peut être en même temps vrai.

Cicéron (-106/-43) : Diodore [d'Iasos], puissant dialecticien ; proposition faite de propositions contradictoires, et l’événement, selon le principe posé [principe de non-contradiction], ne peut avoir lieu. (De Fato [Du destin], VI, 12).
Si une assertion qu’on énonce n’est ni vraie ni fausse, du moins elle n’est pas vraie ; mais comment ce qui n’est pas vrai pourrait-il n’être pas faux, ou ce qui n’est pas faux n’être pas vrai ? On tiendra donc, comme le soutient Chrysippe [de Soles, -IIIe siècle], que toute assertion est ou vraie ou fausse. (De Fato, XVI, 38)

Diogène Laërce : « Parmi les philosophes [...] dialecticiens furent appelés tous ceux qui s'occupent de la subtilité des raisonnements. [...] La dialectique est la partie qui s'occupe des raisonnements des deux autres parties [la physique et l'éthique]. » Vies et doctrines... I, Prologue, § 17.

Diogène Laërce : « La dialectique, comme le dit Posidonios [d'Apamée], est la science de ce qui est vrai, de ce qui est faux et de ce qui n'est ni l'un ni l'autre. Elle concerne, comme le dit Chrysippe [de Soles], les signifiants et les signifiés (1). » Vies et doctrines... VII, Zénon, § 62.
1. " une véritable science du langage et du raisonnement, portant sur les signifiants et les signifiés. Par cette conception, les Stoïciens ont préparé la dialectique à devenir un des arts libéraux. " (Jean-Baptiste Gourinat).



Métaphore du bâton courbé :

Solution classique : Sénèque le Jeune (vers 4/65) : « On ne redresse ce qui est tordu qu’avec une règle. » (Lettres à Lucilius, XI, 10).

Solution dialectique : Plutarque : « Voulant redresser un morceau de bois, on le courbe de l’autre côté. » (Comment distinguer le flatteur de l’ami, 66D). [Idée reprise par Montaigne (Essais, III, x, 1006, et

« Il faut avertir à coups de fouet les mauvais disciples, quand la raison n'y peut assez, comme par le feu et violence des coins nous ramenons un bois tortu à sa droiture. » III, xii, 1045

puis par Descartes (lettre à Mersenne, janvier 1630)]

Louis Althusser (1918-1990) :
« Lorsque Lénine dit : pour redresser le bâton, il faut le courber dans l’autre sens, il refuse l’idéologie de l’efficacité de la vérité pure. Il reconnaît que les idées ont un corps, qui résiste, qu’elles ont une existence matérielle (...) Pour changer les idées, il ne suffit pas de ’dire la vérité’, il faut modifier le rapport de forces qui donne aux idées (fausses, vraies) leur existence sociale ». Projet d’ entretien avec Luis Crespo et Juan Senent-Josa, 1974, Archives Imec (cote ALT2. A46-02.01 1).
‎"Le bâton courbé" par François RICCI [mon prof de philosophie en terminale au lycée Masséna de Nice]
Résumé :
" Quand un bâton est courbé dans un sens, il faut le courber dans l'autre sens", cette idée que Althusser avait présentée dans sa Soutenance d'Amiens comme caractérisant le marxisme est déjà dans l'expérience cartésienne du doute et de la pensée. Si, pour forcer les idées à changer, il faut, selon Althusser, leur imposer une contre-force qui annule la première, ne va-t-on pas alors de courbure en contre-courbures et contre-contre-courbures, c'est-à-dire en déviations ? " Annales de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Nice, Nice 1977, n° 32, pages 117-129.
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Augustin : la dialectique est l’art des arts, la discipline des disciplines ; elle sait apprendre, elle sait instruire ; elle veut rendre les hommes sages, et le fait. (De Ordine, II, xiii, 38).

Commentaire de Martin Heidegger : dialectique : la plus haute dimension de la pensée dans le cours historique de la métaphysique (Principes de la pensée, 1958)


Au Moyen Âge :

Trivium : Rhétorique, dialectique, grammaire (arts libéraux). Les quatre opérations de cette dialectique (qui n’a rien de pré-marxiste) sont alors la division, la résolution, la définition et la démonstration.
Quadrivium : arithmétique, musique, géométrie, astronomie.

On peut voir une source lointaine de la dialectique hégéliano-marxiste chez Jean Scot Érigène (vers 812 - 877), inventeur de la fameuse méthode super, qui note le dépassement de la contradiction par synthèse de deux jugements contraires :
Dieu est essence ;
Dieu n’est pas essence :
Dieu est superessentiel.

Et chez Nicolas de Cuse (1401-1464) : coïncidence des opposés en Dieu.



Schéma Cl. Collin


Blaise Pascal (1623-1662), Pensées :

On y trouve, étonnamment, les principaux éléments des dialectiques hégélienne et marxiste : mouvement, contradictions, unité des contraires.

« Ces extrémités se touchent et se réunissent à force de s’être éloignées [Cf Montaigne, Essais, I, liv, page 311 de l'édition Villey/PUF : " choses qui se tiennent par les deux bouts extrêmes ".], et se retrouvent en Dieu, et en Dieu seulement. » (Br. 72)
« Notre nature est dans le mouvement ; le repos entier est la mort. » (Br. 129)
« Les sciences ont deux extrémités qui se touchent. » (Br. 327)
"Nous avons détruit l’opinion qui détruisait celle du peuple. Mais il faut détruire maintenant cette dernière proposition, et montrer qu’il demeure toujours vrai que le peuple est vain, quoique ses opinions soient saines." (Br. 328)
« Tous leurs principes sont vrais [pyrrhoniens, stoïciens, athées] leurs conclusions sont fausses, parce que les principes opposés sont vrais aussi. » (Br. 394)

« Cette duplicité de l’homme est si visible, qu’il y en a qui ont pensé que nous avions deux âmes.»  (Br. 417)
Critique de Voltaire : « J’aimerais autant dire que le chien qui mord et qui caresse est double »

« Suivons nos mouvements, observons-nous nous-mêmes, et voyons si nous n’y trouvons pas les caractères vivants de ces deux natures [avant et après le péché]. Tant de contradictions se trouveraient-elles dans un sujet simple ? » (Br. 430)
« Les deux raisons contraires. Il faut commencer par là : sans cela on n’entend rien, et tout est hérétique.
En Jésus-Christ toutes les contradictions sont accordées. » [Cf Nicolas de Cuse]. (Br. 684)
« La source de toutes les hérésies est de ne pas concevoir l’accord de deux vérités opposées [juste - pécheur, mort - vivant, élu - réprouvé, etc.]. » (Br. 862)

« Les parties du monde ont toutes un tel rapport, un tel enchaînement l’une avec l’autre, que je crois impossible de connaître l’une sans l’autre, et sans le tout. » (Br. 72). Critique par Voltaire de cette anticipation de la pensée systémique : « Consolons-nous de ne pas savoir les rapports entre une araignée et l’anneau de Saturne, et continuons à examiner ce qui est à notre portée. »

Édition de Port-Royal des Pensées (1670) : « Ne parier point que Dieu est, c’est parier qu’il n’est pas » ; cf  l'Évangile selon Matthieu, XII, 30 : "Qui n'est pas avec moi est contre moi [Qui non est mecum, contra me est]." Objection de Voltaire : celui qui doute et demande à s’éclairer ne parie assurément ni pour ni contre. 

Spinoza : Toute détermination [ou limitation] est une négation (1). (Lettre, 50, à Jarig Jelles)

Gottfried Wilhelm Leibniz : « Sa théorie s’appuie sur un faux principe qu’il [Descartes] s’efforce à nouveau d’introduire ici [article 59] (à savoir que le repos serait le contraire du mouvement) ». (Remarques sur la partie générale des Principes de Descartes).

 
Dialectique selon Immanuel Kant (1724-1804) :
" Usage de la logique générale pour donner l’illusion d’affirmations objectives ; la dialectique n’était rien d’autre [pour les Anciens] que la logique de l’apparence. " (Critique de la raison pure, LT, Introduction, III)
Dialectique transcendantale : étude et critique de l’illusion. (DT)
Penchant à sophistiquer contre les règles du devoir. (FMM)


Et selon Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) :
La vérité n’est complète que dans l’unité de l’identité avec la différence (Science de la logique). Pour le philosophe de Iéna, le vrai est le tout, et le tout est l’essence s’accomplissant à travers son développement (Phénoménologie de l’esprit, Préface, II). Il y a là « définitions » circulaires de la vérité, de la totalité et du mouvement. La contradiction (ou négativité) serait la racine de tout mouvement [À quoi on peut objecter que l’opposition des contraires est tout autant facteur d’équilibre que du changement] et de toute vivacité ; « ce n’est que dans la mesure où quelque chose a en soi une contradiction qu’elle se meut, qu’elle possède une force et une activité. » 

Triade « thèse, antithèse, synthèse [certains diront : foutaise] » ; union des contradictoires en une catégorie supérieure ; c’est une élaboration de la " méthode super "de Scot Érigène.


Arthur Schopenhauer (MVR) :

Dialectique : art puéril de déraisonner ; combinaisons les plus insensées de termes contradictoires.
Les hégéliens ont une vénération pour le principe de [Baruch] Spinoza : « Toute détermination [ou limitation] est une négation » (Lettre, 50, à Jarig Jelles) ; fidèles à l’esprit charlatanesque de leur école, ils ont l’air de considérer ce principe comme s’il était capable de faire sortir le monde de ses gonds.


Karl Marx (1818-1883) et les marxistes :

Karl Marx affirmait en 1844 que Ludwig Feuerbach (1804-1872) avait remis la dialectique sur ses pieds alors qu’elle marchait sur la tête.

« La question : s'il y a lieu de reconnaitre à la pensée humaine une vérité objective, n'est pas une question de théorie, mais une question pratique. Dans la pratique l'homme doit prouver la vérité, c'est à dire l’effectivité et la puissance,  la Diesseitigkeit [l’immanence, le caractère terrestre] de sa pensée dans ce monde et pour notre temps. La discussion sur l’effectivité ou la non effectivité d'une pensée qui s'isole de la pratique est une pure question  scolastique. » (Karl Marx, L'Idéologie Allemande - Deuxième thèse sur Feuerbach. 1846).

« La nature de Proudhon le portait à la dialectique. Mais n'ayant jamais compris la dialectique vraiment scientifique, il ne parvint qu'au sophisme. En fait, c'était lié à son point de vue petit-bourgeois. Le petit-bourgeois, tout comme notre historien Raumer, se compose de " d'un côté " et de " de l'autre côté ". Même tiraillement opposé dans ses interêts matériels et par conséquent ses vues religieuses, scientifiques et artistiques, sa morale, enfin son être tout entier. Il est la contradiction faite homme. » (Karl Marx, lettre à J. B. Schweitzer, 24 janvier 1865).

« Toute action humaine peut être envisagée comme une abstention de son contraire. » (Karl Marx, Le Capital, XXIV, iii). Mais n’est-ce pas s’aventurer que d’affirmer qu’une action a un unique contraire, bien défini ?

Prophétie d’origine hégélienne : La lutte des classes doit aboutir à une société sans classes ni État.

« Le mouvement de la pensée n’est que la réflexion du mouvement réel, transporté et transposé dans le cerveau de l’homme » (Marx, Le Capital, t. I)

« Principe fondamental de la dialectique : il n’existe pas de vérité abstraite, la vérité est toujours concrète » (Vladimir I. Lénine).

« La dialectique est l’étude de la contradiction dans l’essence même des choses » (Vladimir I. Lénine, Cahiers philosophiques).

« La dialectique est la théorie qui montre comment les contraires peuvent être et sont habituellement (et deviennent) identiques – dans quelles conditions ils sont identiques en se convertissant l’un en l’autre [Cf George Orwell : « WAR IS PEACE, FREEDOM IS SLAVERY, IGNORANCE IS STRENGTH. » (1984)] – l’entendement humain doit prendre ces contraires pour vivants, conditionnés, mobiles, se convertissant l’un en l’autre » (V. I. Lénine, Cahiers philosophiques).
Ainsi un progressiste devient réactionnaire, un ami de 30 ans un rival, les premiers les derniers. Mais pas sous le même rapport, comme avertissait déjà Aristote de Stagire.

La dialectique, « science fondamentale du prolétariat » (Jean-Toussaint Desanti).

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Contraires et contradictoires, au sens strict : les propositions contradictoires ne sont jamais ni vraies ni fausses ensemble ; les contraires ne peuvent jamais être vraies ensemble ; mais elles peuvent être toutes deux fausses.
Actuellement, notamment en théorie des probabilités, contraire prend la signification de contradictoire.

Les dichotomies théorie-pratique, création-production, bourgeois-prolétaire, abstrait-concret, dialectique-mécanique, forces productives – rapports de production, vie-mort, sont des postulats qui   ne s’avouent pas, présentés comme des évidences. La dialectique binaire s’oppose à la continuité des formes et surtout à la connaissance ouverte, non instrumentalisée. Or ce dualisme n’est pas pertinent ; la mort n’est pas le « contraire » de la vie (X avant sa naissance n’est ni mort ni vivant) ; strictement parlant, la négation est un opérateur qui ne s’applique qu’aux propositions ; « Voltaire est mort » est bien le contraire de « Voltaire est vivant ». Cf la remarque de Jacques Monod.

De plus, il y a la mort propre et la mort de l’autre, la mort réelle, la mort imaginée, la mort symbolique, etc.

Paradoxes de la non-contradiction (dus à des confusions entre contraires et contradictoires) : Russell : le roi de France (n’) est (pas) chauve. Chrysippe : ce que tu n’as pas perdu, tu l’as.


Jacques Monod, biologiqte, né à Paris en 1910 - décédé le 21 mai 1976 à Cannes (Alpes-Maritimes) : « Puisque, donc, la pensée est partie et reflet du mouvement universel, et puisque son mouvement est dialectique, il faut que la loi d’évolution de l’univers lui-même soit dialectique. Ce qui explique et justifie l’emploi de termes tels que contradiction, affirmation, négation, à propos de phénomènes naturels. […] le prophétisme historiciste fondé sur le matérialisme dialectique était, dès sa naissance, lourd de toutes les menaces qui se sont, en effet, réalisées. Plus encore peut-être que les autres animismes, le matérialisme dialectique repose sur une confusion totale des catégories de valeur et de connaissance. C’est cette confusion même qui lui permet, dans un discours profondément inauthentique, de proclamer qu’il a établi "scientifiquement" les lois de l’histoire auxquelles l’homme n’aurait d’autre recours ni d’autre devoir que d’obéir, s’il ne veut entrer dans le néant. » (Le Hasard et la nécessité, 2, 9, Paris : Seuil, 1970).


André Comte-Sponville :
« Au sens ontologique, ce [la contradiction] serait la présence, dans le même être, de deux propriétés incompatibles (auquel cas l’être en question ne saurait subsister) ou opposées. En ce dernier sens, qui est un sens vague, mieux vaut parler d’ambivalence, de discordance ou de conflit. Cela évitera de prendre la dialectique pour une nouvelle logique, quand elle n’est qu’une nouvelle grille de lecture, voire une nouvelle  rhétorique. » (Dictionnaire philosophique, « Contradiction »)
« La dialectique, c’est sa fonction, a réponse à tout […] C’est l’art de se donner raison dans le langage, quand bien même tout le réel nous donnerait tort. C’est bien commode. C’est bien vain. Un dialecticien un peu talentueux est toujours invincible, au moins intellectuellement, puisqu’il peut à chaque fois intégrer la contradiction même qu’on lui oppose dans son propre développement, et la dépasser par là. Si tout est contradictoire, que nous fait une contradiction ? Ainsi la dialectique est sans fin. C’est le bavardage de la raison, qui fait mine de se contredire toujours pour ne se taire jamais. » (Dictionnaire philosophique, « Dialectique)


Dans son Traité d'athéologie (2005), Michel Onfray semblait favorable au marxisme, comme d'ailleurs à Sigmund Freud qu'il a démoli récemment (2). Il y évoque à trois reprises une dialectique, très probablement marxiste : "jeux dialectiques" (Théocratie, III, 4), "pensons de manière dialectique" (III, 10), "avançons de manière dialectique" (III, 12).

Jean-Claude Michéa, "la méthode dialectique, qui procède toujours « de l’abstrait au concret »".  C'est bien la faille de cette méthode, la pensée devant procéder par allers et retours entre l'abstrait et le concret, ou plus précisément entre les différents niveaux d'abstraction et de concrétisation. Cette faille est fréquente chez les gens qui n'ont aucune formation scientifique.


NOTES

1. Négations active et passive de : A croit p.
Non (A croit p) = A ne croit pas p
A croit Non (p)
La négation passive du mouvement est le repos, les négations actives les mouvements dans des directions différentes. Déjà Leibniz : « Je pense que le mouvement opposé est plus contraire à un autre mouvement que ne l’est le repos. » (Remarques sur Descartes, articles 54, 55).
La négation passive de l’obligation est la non-obligation, la négation active l’interdiction.

2.  " Les Lumières qui suivent Kant sont connues : Feuerbach, Nietzsche, Marx, Freud entre autres. " (Introduction, 5). " Le désir de faire rentrer par la fenêtre la Bible et autres colifichets monothéistes que plusieurs siècles d'efforts philosophiques ont fait sortir par la porte - dont les Lumières et la Révolution française, le socialisme et la Commune, la gauche et le Front populaire, l'esprit libertaire et Mai 68, mais aussi Freud et Marx, l'école de Francfort et celle du soupçon des nietzschéens de gauche français ... - c'est proprement et étymologiquement consentir à la pensée réactionnaire. " (Athéologie, II, 4). " Tout ce qui définit habituellement le fascisme se retrouve dans la proposition théorique et la pratique du gouvernement islamique [...] la haine des Lumières - raison, marxisme, science, matérialisme, livres. " (Théocratie, III, 8).

Ouvrage pas encore consulté.



lundi 17 janvier 2022

NOTES HISTORIQUES CONTRE LA PÉDOPHILIE, dont " LE BAZAR DE D. C.-B. "


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          CHRONOLOGIE SOMMAIRE

§ - En 1536, le prêtre Benoît Gréalou, " convaincu d'avoir commis le péché sodomite avec trois ou quatre jeunes enfants ses disciples ", fut brûlé vif à Cahors (Archives départementales du Lot, F 179).

- Le musicien et maître des Enfants de chœur de la Sainte Chapelle du Roi à Dijon, Richard Renvoisy, fut condamné à mort en mars 1586 et exécuté à Dijon pour relation coupable avec un de ses enfants de chœur. Il avait traduit les Odes d'Anacréon.



- Brantôme rapporta un cas d'exécution capitale d'un homme coupable d'avoir engrossé une fille de neuf ans (Les Dames galantes), et précisa que l'âge de maturité pouvait être à l'époque de douze ou treize ans.

- Jean Imbert Brunet, prêtre du lieu d'Ollioules [Var actuel], prévenu de « sodomie abominable commise à la personne de Gabriel Maistral âgé de cinq ans », fut condamné en 1599 par la justice ecclésiastique à la réclusion dans un monastère ; puis, réclamé par la justice civile qui fait prévaloir sa compétence sur celle de l'Official [juge ecclésiastique], il fut condamné à mort, à être brûlé, en avril 1601 ; peine exécutée, malgré les efforts de l'archevêque d'Aix-en-Provence pour le sauver en refusant de le dégrader avant l'exécution (mss 1787, consulté, fonds Peiresc, de la Bibliothèque Inguibertine de Carpentras)..


- Dans ses Mémoires-Journaux, Pierre de L'Estoile cita le cas d'un vicaire du quartier parisien de Vaugirard accusé d'avoir violé une fille de neuf ans, et qui, sachant que le prince de Conti voulait le faire arrêter, alla se constituer prisonnier à l'Évêché (Paris : Édition Alphonse Lemerre, 1879, tome VII, page 324) ; autre scandale, un moine de l'ordre des Carmes, le père Camus, accusé de sodomie avec un novice " âgé seulement de quinze à seize ans " (id., ibid.). En août 1608, un prêtre de St Honoré, « dans l’église même, bougeronne un jeune garçon » (id., tome IX, page 122)

Pierre Jarrige : Les Jésuites mis sur l'échafaud pour plusieurs crimes capitaux par eux commis dans la province de Guyenne. Avec la réponse aux calomnies de Jacques Beaufés, jésuite, Leide (Pays-Bas) 1649.

Chapitre V " Les impudicités des jésuites dans leurs classes" : pages 42-45.

Les mollesses , les attouchements sensuels, les pollutions, et les ordures sont si communes à leurs jeunes gens, qu'ils en laissent les marques et les vestiges partout avec tant d'horreur, que leur lascivité n'est pas imaginable. il s'est trouvé des régents parmi eux, qui n'ont pas fait difficulté de se faire toucher déshonnêtement à leurs écoliers, pour se faire exciter à cette abominable infamie, jusque-là que quelques uns de ces enfants s'étant faits dû depuis de leur société ont accusé ces vilains à leur maître de novices. Mon encre rougit écrivant ces saletés. Le collège de Limoges ne peut nier qu'un de ses régents nommé Sanguinière n'ait appelé plusieurs fois un beau garçon les dimanches et jours de congé, sous prétexte de lui corriger ses compositions, ne l'ait entretenu de discours amoureux, et se soit fait toucher avec tant de passion, que l'habitude au mal depuis l'aveugla, et le porta même à le faire venir dans sa grande chaire, ut intermanus illuis se pollueret, pendant que ses disciples étaient attentifs à composer dans la classe. J'ai surpris moi-même, étant préfet dans le collège d'Agen, le maître de la quatrième, nommé François Mingeloussaux baisant ardemment, et serrant entre ses genoux et ses bras un petit gentilhomme de ses écoliers ; l'enfant qui était innocent s'estimait bien chéri ; mais si son père, l'un des plus généreux de ce pays, avait appris ces infamies, quelque crédit que les jésuites aient, il lui eût coupé les oreilles. Si j'avais à nommer les autres qui dans leur régence tombent et sont tombés dans cette infirmité, je m'arrêterais premièrement dans le collège de Bordeaux, puis parcourrais les autres l'un après l'autre, et finissant par celui de Fontenay, je devrais voir que dans chacun est arrivé quelque saleté de telle nature. Ils ne peuvent tenir les mains sans toucher, ni la bouche sans baiser, et cette parole est ordinaire dans l'entretien des écoliers les plus clairvoyants, un N.N. (*) est la Demoiselle de notre Régent. Ces horribles sodomies que quelques uns de leurs régents exercent ne se rencontrent pas seulement dans les grandes académies où ils ont à choisir; mais elles règnent encore dans les plus petits collèges et résidences, tant aujourd'hui le mal est général dans cette société. Deux écoliers de la petite ville de Saint Macaire se sont plaints à leurs parents, et les parents au supérieur du lieu, qu'un certain Gervaise leur maître les avaient forcés, et marquaient si distinctement le lieu, la façon, les circonstances, qu'il fut aisé de convaincre ce gomorrhéen et ce sodomite. Christophe Penaud son préfet est un témoin irréprochable de cette conviction puisqu'il eut la commission du recteur de Bordeaux d'en faire de véritables et secrètes informations. Il y a des seigneurs d'éminente condition dans la ville de Bordeaux qui savent que Léonard Alemay les a fait déchausser, non pour autre fin que pour contempler leur nudité. Les fesser de la main par délices est un passe-temps à ces infâmes, que Dieu brûlera de son feu s'ils ne se retirent d'un péché qui couvre de honte et de confusion la nature.
*. Nomen nescio (je ne connais pas le nom), abrégé ici en N.N., est une expression utilisée pour parler d'une personne anonyme ou non définie.

Réponse aux calomnies....
Toute la province sait que du temps du provincial Malescot , le général de l'ordre Mutius Vitelleschi avait écrit de n'attendre plus et de le renvoyer, puisqu'il était incorrigible ; le principal crime dont il était chargé était qu'il avait touché déshonnêtement quelques petits écoliers d'une rare beauté, et même dans la maison une nuit il s'était levé de son lit pour aller coucher avec un certain jeune philosophe mon condisciple, nommé Martial Lamy religieux jésuite.


§ - Tallemant des Réaux fit apparaître dans ses magnifiques Historiettes qu'au XVIIe siècle un garçon de 15 ans pouvait encore être considéré comme innocent ; il notait d'une fille que " dès treize ans, elle fut débauchée " (collection " Bibliothèque de la Pléiade ", Paris : Gallimard, 1961 : tome I, page 418 ; tome II, page 273).

- Le diplomate allemand Ézéchiel Spanheim, évoquant la séduction dont fut l'objet, en 1682, un fils naturel de Louis XIV âgé de quatorze ans, mentionnait " le vilain commerce entre de jeunes seigneurs de la Cour, où, sortant à peine de l'enfance (souligné par moi), on trouva qu'il avait été entraîné, et dont il fut châtié sévèrement par ordre du Roi son père" (Relation de la Cour de France en 1690, édition Renouard, 1682, page 101).

- Dans une lettre du 3 décembre 1705, Madame, belle-sœur de Louis XIV, stigmatisait les mœurs  de la Cour de France et exposait une typologie précise des anomalies sexuelles où figurait notamment l'attrait pour les enfants de dix, onze ans (Briefe, 1676-1706, 1867).

- Le 18 novembre 1725, l'abbé Gillot déclara au Lieutenant de Police de Paris : " C'est le sieur Milly, supérieur des clercs de la paroisse St Eustache, qui [m]'a séduit dès l'âge de 14 ans en me faisant des attouchements". (Archives de la Bastille, Bibliothèque de l'Arsenal, Paris, manuscrit 10256).

- En 1731, l'avocat Mathieu Marais et le magistrat Jean Bouhier s'échangèrent des informations sur l'affaire de Bordeaux, envers de celle du Père Girard à Aix, et à la suite de laquelle MM. du Parlement auraient retiré leurs enfants du collège des jésuites.

- Une archive de la police parisienne, (6 octobre 1743), mentionna un écrivain de 60 ans qui avait violé une petite fille de 4 ans : " Je l'ai envoyé en prison et vais prendre des mesures pour lui faire faire son procès à la requête du procureur du Roi s'il est possible. J'ai cru devoir donner cette satisfaction à son quartier, qui dans le moment qu'on l'a arrêté s'est mis à crier qu'il fallait le mener à la Grève [lieu d’exécution des peines capitales]. " (Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, manuscrit 719, réserve 21, folio 233, verso).

- En 1750, Charles Collé, secrétaire du duc d'Orléans, nota au sujet d'une maquerelle fustigée, une certaine dame Moyon : " Son crime était d'avoir débauché de petites filles de 9 ou 10 ans et de les avoir prostituées. Je ne comprends pas pourquoi elle n'a pas été condamnée à la mort ; les lois infligent la peine capitale dans les cas de rapt, même le rapt de séduction ; le crime de la Moyon me paraît plus grand. " (Journal et Mémoires, édition 1868, tome I, page 200).

- Février 1752 :
D'Argenson, Journal et Mémoires, volume VII, 12 février 1752, page 109.

D'Argenson, Journal et Mémoires, volume IX, 4 septembre 1755, page 80.

- En 1764, critique anglaise de l’article (Amour socratique, Dictionnaire philosophique) de Voltaire : “ Our courts of justice are sufficiently convinced, by hateful experience, that, if very young persons are ever made accessory to this horrid species of guilt, the principal, the seducer, is ever some hypocritical monster, old enough to be hackneyed in the ways of vice and iniquity. ” (Monthly Review, volume 31)

« Est-il vrai que le jésuite qui avait enfondré (1) le cul du prince de Guéménée (2) est mort ? Ne s’appelait-il pas Marsy (3) ? On dit d’ailleurs [par ailleurs] que c’était un garçon de mérite. »
Voltaire, lettre à D’Alembert, 16 mars 1765.
1. Selon Alfred Delvau, « Effondrer = Enfoncer, dans l’argot des voyous. » (Dictionnaire de la langue verte).
2. Henri Louis Marie, prince de Rohan.
3. François Marie de Marsy, 1714 / 16 décembre 1763. 


- En 1771, Thévenau de Morande signala dans son Philosophe cynique que l’abbé Grizel « a été accusé par le sacristain de sa paroisse d’embrasser les petits enfants qu’il confesse pour leur pénitence ».

   L'Ancien Régime n'était donc pas aussi laxiste que les travaux superficiels de l'ancien élève des Jésuites Philippe Ariès  (1914-1984) avaient pu le laisser envisager (sur le seul cas de Louis XIII enfant), même si certains poissons arrivaient à passer au travers des mailles du filet et si l'application des lois était moins rigoureuse sous le tandem Louis XV - Pompadour. Je regrette de ne pas avoir pu prendre connaissance de la communication " Le mythe de l'adolescence " que Philippe Ariès annonça pour le congrès homosexuel de 1955 à Paris, congrès organisé, puis annulé  en dernière minute, par la revue mensuelle Arcadie.

Pour la période révolutionnaire, on lit dans un rapport de police du 19 octobre 1793 :
" Le jardin de la Révolution, les galeries surtout proches le théâtre de la Montansier, sont remplies de jeunes gens de l'un et de l'autre sexe, depuis l'âge de sept ans jusqu'à quatorze et quinze, qui se livrent presque publiquement aux polissonneries et aux excès de la débauche la plus infâme ; ils sont presque nus comme la main, et offrent aux passants le plus avilissant spectacle" (Cité par Charles-Aimé Dauban, La Démagogie à Paris en 1793, Paris : Plon, 1867, page 471).
- Le 24 mai 1798, le commissaire Picquenard écrivit au président du Directoire exécutif : " On vient d'amener, au bureau central, plusieurs enfants de sexe masculin, dont le plus âgé avait à peine six ans, tous infectés du virus vénérien. Ces petits malheureux, dont on ne peut entendre les propos sans frémir d'horreur, sont amenés au Palais-Royal par leur mère pour servir d'instrument à la plus infâme comme à la plus horrible débauche. Les leçons de l'exécrable roman de Justine sont mises en pratique avec une audace qui n'eut jamais d'exemple. " (BnF, manuscrit français, N.A. [Nouvelles acquisitions] 3533, folios 351-352). Le roman de Sade Justine ou les Malheurs de la vertu avait été publié l'année précédente.

Le XIXe siècle n'était pas mieux disposé.

« La médiatisation des abus sexuels dont sont victimes les enfants – c'est-à-dire leur recensement, leur analyse et leur dénonciation dans l'espace public – ont longtemps été voués à une grande discrétion, pour ne pas dire au silence presque total : durant le XIXe siècle, ils ne sont que très rarement évoqués dans la Gazette des tribunaux et uniquement s'ils sont accompagnés de crimes de sang. »
Anne-Claude Ambroise-Rendu, " Un siècle de pédophilie dans la presse (1880-2000) : accusation, plaidoirie, condamnation ", Le Temps des Médias, n° 1, automne 2003.

En fait, la discrétion n'était pas si grande.

- " Lorsque le Père Contrafatto, prêtre italien officiant à Paris, est accusé, en 1826, de violence sexuelle sur une enfant de 5 ans, son long procès révèle d’abord l’incompréhension des juges. Comment un homme aussi discret, aux mains aussi blanches, à l’apparence aussi raisonnable, peut-il se livrer à des actes aussi abjects  ? Comment son apparente normalité peut-elle recéler sa redoutable duplicité  ? Contrafatto, condamné, sera d’ailleurs rapidement libéré, protégé par l’Église autant que par le pouvoir d’une Restauration craignant les effets politiques de la querelle religieuse. "
" Pédophilie : il y a loin du pardon à la justice ", LE MONDE | 28.03.2016

- En 1847, le ministre de la Justice Nicolas Martin du Nord se serait suicidé après la révélation par la presse de son intérêt pour les petites filles de dix à douze ans (cf Proudhon, Carnets, n° 8, et Karl H. Ulrichs, Vindicta, page 32).

- En 1856, Alexis Dupont, ancien ténor à l'Académie Royale de Musique, se suicida en prison après avoir été arrêté, avec deux complices, pour attentat à la pudeur sur enfants des deux sexes au-dessous de huit ans (cf Maxime Du Camp, lettre à Gustave Flaubert, 30 août 1856, et Horace de Viel-Castel, Mémoires sur le règne de Napoléon III, à la date du 7 septembre 1856).

- Le Journal de Rouen révélait le mercredi 11 septembre 1861, en page 3, une affaire impliquant un certain Philémon Delaurier, 22 ans, en religion Frère Catulle, et vingt-cinq enfants de six à dix ans de la maison des Frères de la Doctrine chrétienne à Saintes (Charente-Maritime). Le frère Catulle fut condamné par la Cour d'assises aux travaux forcés à perpétuité.

- Entre 1837 et 1862, le curé Charles-Eugène Pelletier commit de nombreux attentats à la pudeur sur de jeunes garçons ; condamné par contumace en 1838, il fut signalé, parfois sous un faux nom, à Paris et en province, et même une fois en Belgique, avant d'être arrêté, puis condamné en mai 1863 aux travaux forcés à perpétuité (cf Le Siècle, 4 juin 1863).

 - " En 1865 un frère des écoles chrétiennes de Versailles est accusé d’attentats à la pudeur sur 87 enfants, provoquant la colère et le désarroi des parents, leur vindicte aussi, certains proposant même de «  brûler et saccager la maison des frères  ». "
" Pédophilie : il y a loin du pardon à la justice ", LE MONDE | 28.03.2016

- En 1868, fut publié l'ouvrage d'Émile Alexis, Les Immoralités des prêtres catholiques ; l'auteur proposait la solution radicale de la castration des prêtres.

- En 187., scandale du vicaire de Villiers-le-Bel (Val d’Oise). « Sous prétexte de continuer leur instruction religieuse, il emmena un jeudi sept ou huit de ces garçonnets dans la forêt d’Ermenonville, et là, dans un fourré, il se déshabilla, se mit complètement nu, et entourant son corps de petites branches et de tiges de lierre arrachées aux arbres du fourré, il prit devant ces enfants des poses de faune au bois et les excita par des caresses – auxquelles quelques uns se prêtèrent. Au retour l’un d’eux, que ce spectacle avait révolté, en fit le récit au chef de l’institution, qui prévint immédiatement, non pas le parquet, de crainte d’un scandale qui portât préjudice à la maison, mais l’évêque de Versailles : celui-ci se contenta de changer le vicaire de commune. » (Léon Fiaux, La Police des mœurs en France, Paris : E. Dentu, 1888).

- En 1873, Louis Baudier publie chez Millière Arlequin démocratique et on y trouve, pages 89-240, une partie intitulée " Sur les genoux de l'Église ".

- Dans une lettre à Mme Léonie Brainne, Gustave Flaubert signalait que la maîtresse d'asile de Suresnes était en prison pour « corruption d'enfants au-dessous de dix ans », et ajoutait : « Pauvre humanité » (lettre du 15 mars 1877).

Bibliothèque municipale de Rouen, mm 265, pièce 87.

La Pléiade, édition Bruneau/Leclerc, tome V (2007), page 204.

Centre Flaubert



- « En 1885, dans la commune de Gleizé [Rhône], la plupart des enfants de l'école congréganiste furent souillés par un de leurs maîtres », écrivait le Dr Alexandre Lacassagne en 1886 (Article "Pédérastie", Dictionnaire Encyclopédique des Sciences Médicales, volume 22).

- Le Journal de Rouen du 29 octobre 1890, page 3, parlait d'une " scène épouvantable " avec un enfant de 12 ans dans l'affaire du journalier Léon-Honoré Duboc.


§ Lyon, encore...

Le journaliste Luc Rosenzweig, aujourd'hui retraité du quotidien Le Monde, a donné un témoignage précieux sur les années 1950. Dans sa chronique " Pêle-Mêle " du quotidien Le Monde du 6 mars 2001, il interrogeait : 

« Pourquoi, vers le milieu du siècle dernier, a-t-on laissé "œuvrer" pendant plusieurs lustres, dans un prestigieux établissement public d'enseignement secondaire de Lyon, deux aumôniers catholiques, le Père A. et le Père G. dont les comportements nous semblent, aujourd'hui, sans équivoque ? »

Dans un e-mail, il me précisait : 
« Les aumôniers auxquels je faisais allusion étaient en fonction dans l'établissement que je fréquentais alors. Assistant, (à l'insu de mes parents, qui n'étaient pas catholiques) à des cours d'instruction religieuse en sixième, j'ai été alors intrigué, mais pas plus que ça, par les méthodes de ces deux abbés, qui prenaient les gamins sur les genoux pour leur caresser les cheveux, organisaient des séances de "confessions", à genoux sur un petit banc au fond de la classe, au cours desquelles ils faisaient raconter aux enfants leurs pratiques nocturnes avec force détails. En ce qui me concerne, les choses n'ont pas été plus loin, mais bien des années après, quelques anciens condisciples rencontrés par hasard m'ont confirmé que pour certains d'entre eux, notamment au cours des camps de scouts que l'un des aumôniers animait, on était allé bien plus avant dans des pratiques aujourd'hui qualifiées de pédophiles. Au milieu des années 60, ils ont, paraît-il, été discrètement mis à l'écart, sans que le scandale n'éclate publiquement...Tout cela, naturellement, demande à être vérifié, et fera peut-être l'objet d'une recherche que je mènerai […]. L'allusion faite dans ma chronique était, dans cette optique, destinée à déclencher des témoignages me permettant de l'amorcer. »

§ 

Affaire Dugué, juillet 1978.


§ LE BAZAR DE COHN-BENDIT

  Au cours de la polémique Roman Polanski - Frédéric Mitterrand, Daniel Cohn-Bendit (né en 1945) fut amené à demander la démission de Benoît Hamon de son poste de porte-parole du Parti Socialiste. Cela entraina en retour des imputations de pédophilie à l'égard de Dany le vert.
   Il importe de préciser que D. C.-B. n'a, je crois,  jamais été vraiment pédophile, que sa "pédophilie" est toute politique et en aucun cas véritablement sexuelle (mis à part cependant un léger trouble). Ce que l'on peut lui reprocher, c'est, bien qu'il soit de langue maternelle allemande, une incompréhension totale des idées de Sigmund Freud et Wilhem Reich, incompréhension qui servit de base à une promotion inconsidérée de la sexualité des enfants.

– LE BAZAR DE COHN-BENDIT

Daniel Cohn-Bendit, Le Grand Bazar, Paris : P. Belfond, 1975. Dans le chapitre IX, « Little big men », on lit : 
« [page 198] J’ai travaillé pendant deux ans dans ce jardin [d'enfants ; de 1972 à 1974]. Il y avait des gosses entre deux et cinq ans. C’était une expérience fantastique. Si l’on est un peu ouvert, les enfants nous aident beaucoup à comprendre nos propres réactions. […] Au début j’étais plein d’énergie. Je jouais énormément, je me battais, bref je m’identifiais totalement à eux. Je me suis alors rendu compte que j’avais besoin d’être inconditionnellement accepté par eux. Je voulais que les gosses aient envie de moi et je faisais tout pour qu’ils dépendent de moi. Je crois que c’est le problème de toutes les grandes personnes avec les enfants. […] [199] Mon flirt permanent avec les gosses prenait vite des formes d’érotisme. Je sentais vraiment que les petites filles à cinq ans avaient déjà appris comment m’emmener en bateau, me draguer. C’est incroyable. La plupart du temps j’étais assez désarmé. […] [203] Les conflits avec des parents n’ont pas manqué. Certains enfants avaient souvent vu leurs parents faire l’amour. Un soir, une petite fille va voir sa copine chez elle, et lui demande : " Veux-tu faire l’amour avec moi ? " Et elle parlait de baisage, de bite, etc. Alors les parents de la copine, qui étaient des catholiques pratiquants, sont venus se plaindre, très, très choqués. Il m’est arrivé plusieurs fois que certains gosses ouvrent ma braguette et commencent à me chatouiller. Je réagissais de manière différente selon les circonstances, mais leur désir me posait un problème. Je leur demandais : "Pourquoi ne jouez-vous pas ensemble, pourquoi vous m’avez choisi, moi, et pas les autres gosses ?" Mais s’ils insistaient, je les caressais quand même. Alors on m’accusait de "perversion". Il y a eu une demande au Parlement pour savoir si j’étais payé par la municipalité, toujours au nom de la loi qui interdit aux extrémistes d’être fonctionnaires. J’avais heureusement un contact direct avec l’association des parents, sans quoi j’aurais été licencié. En tant qu’extrémiste, je n’avais pas le droit d’être avec des enfants. […] Pendant toute une période, je m’étais identifié aux gosses. Mais à partir d’un certain moment, les problèmes des enfants ont [204] commencé à ne plus m’intéresser. Ces gosses venaient d’un milieu social en fin de compte inintéressant. Ce n’était pas un jardin d’enfants normal, et l’expérience n’était pas assez radicale.[…] [209] Reich, c’est la lutte pour la sexualité, et surtout la sexualité des jeunes. Un des problèmes du jardin d’enfants, c’est que les libéraux admettent, à la rigueur, l’existence de la sexualité, alors que nous, on essayait de la développer, d’avoir un comportement qui permette aux enfants de réaliser leur sexualité. » (Daniel Cohn-BenditLe Grand Bazar, Paris : P. Belfond, 1975, chapitre IX, « Little big men »).


   Sigmund FREUD ne vit jamais dans la "sexualité infantile" une justification de la pédophilie ; cela apparaissait dès 1905 avec le premier des Trois essais sur la théorie de la sexualité (section I, B) ; la même année, il déclarait à un quotidien viennois que la pédophilie homosexuelle devait être poursuivie devant les tribunaux, mais dans les mêmes conditions que la pédophilie hétérosexuelle (Die Zeit, 27 octobre 1905, page 5) ; le seuil de consentement en Autriche était alors de quatorze ans (soit le seuil du droit canon). Freud pensait (on voit aujourd'hui avec quelle raison !) qu'une activité sexuelle précoce diminuait l'éducabilité de l'enfant, et que la construction de la personnalité psychologique et sociale (acquisition du principe de réalité) requérait que la fonction sexuelle ne soit pas sollicitée précocement.

   Le freudo-marxiste Wilhelm REICH considérait l'homosexualité comme une sorte de satisfaction parallèle à la satisfaction hétérosexuelle et souhaitait qu'elle soit dénuée de toute sanction pénale, sauf précisément dans le cas de séduction d'enfants (Die Sexualität in Kulturkampf, 1936).


   C'est donc à tort que Daniel Cohn-Bendit, qui bien qu'Allemand (1) semblait vers l'an 2000 se prendre pour le sauveur de la vie politique française, invoqua ces deux auteurs pour tenter de justifier ses tristes écrits de 1975 et ses propos provocateurs à Apostrophes en 1982.

Vidéos :
Cohn-Bendit à Apostrophes (Antenne 2) en avril 1982 suivie de sur France 3 en février 2001.

1. D. C.-B. a la nationalité française depuis 2015, et il semblait il y a peu passer pour le sauveur de l'écologie française.

§ Jacques Gaillot, ancien évêque d´Évreux (décédé en avril 2023),

destitué par le Vatican en 1995 pour son progressisme, reconnut, le 8 décembre 2000, qu´il était au courant du passé du père Denis Vadeboncœur, prêtre québécois mis en examen et écroué, le 1er décembre, pour viols sur mineurs de moins de 15 ans et de plus de 15 ans par personne ayant autorité. Le père Vadeboncœur fut condamné en novembre 1985 à 20 mois de prison au Québec pour abus sexuels. En 1988, il fut accueilli dans le diocèse d´Évreux et nommé, par Mgr Gaillot, curé de la paroisse de Lieurey (Eure). Un homme de 25 ans [en 2000] porta plainte pour viols – faits qui se seraient produits pendant cette période, avant et après 1990.

Dans un entretien (Paris-Normandie, 6 décembre 2000), l´ancien évêque d´Évreux affirmait pourtant ignorer « tout de la gravité des faits » qui valurent condamnation au père Vadeboncœur : « Je ne l´aurais pas accepté dans le diocèse si j´avais su qu´il avait été condamné pour pédophilie. » Gaillot précisait même qu´il avait reçu des supérieurs du prêtre au Québec « une lettre d'accompagnement favorable ».

Ces dénégations suscitèrent une polémique au Canada. La congrégation des religieux de Saint-Vincent-de-Paul, à laquelle appartenait ce prêtre, décida de rendre public, le 7 décembre 2000, l´échange de courriers, en 1987 et 1988, avec l´évêché d´Évreux.

Dans une lettre du 13 octobre 1987, l´abbé Jean-Jacques Latour, secrétaire de Mgr Gaillot, demandait des « renseignements complémentaires » sur le père Vadeboncœur. Le provincial canadien des religieux de Saint-Vincent-de-Paul lui envoya un long courrier du 29 octobre 1987 détaillant les agissements et la condamnation du prêtre québécois :
« Au tout début du mois de février 1985, le père Vadeboncœur a été arrêté à la suite d´une enquête policière. Il était alors accusé d´actes de grossière indécence et d´agression sexuelle à l´égard de quelques adolescents, âgés de 12 à 17 ans, et d´un acte de sodomie avec un de ceux-ci. » Le père Pierre Lévesque, signataire de la lettre, estimait qu´il n´est pas « déraisonnable d´entretenir certains doutes sur [la] capacité [du père Vadeboncœur] de ne pas récidiver ».

Par courrier du 24 février 1988, le secrétaire de Jacques Gaillot accusait réception et expliquait, à propos du père Vadeboncœur : « Nous espérons comme vous que ce changement de climat permettra un nouveau départ, au service de l´Évangile. »
Revenant sur ses précédentes déclarations, Mgr Jacques Gaillot reconnaissait, vendredi 8 décembre [2000], dans un communiqué, qu´il avait été informé du passé du prêtre québécois : « Avant de décider de l´accueil de Denis Vadeboncœur à Évreux, j´ai reçu quelques informations fragmentaires et incomplètes sur la courte détention qu´il avait subie au Québec. (…) Ce n´est que plus tard que j´ai reçu des informations plus détaillées. Néanmoins, face à sa volonté de réinsertion et en l´absence de toute critique de ses paroissiens, je n´ai pas estimé devoir revenir sur cette décision d´accueil. »

Xavier Ternisien, " Mgr Gaillot connaissait le passé pédophile d'un prêtre québécois avant son arrivée dans son diocèse ", Le Monde, 10-11 décembre 2000.

Contrairement à ce qui est reproché à l´évêque de Bayeux, Mgr Pierre Pican, mis en examen pour non-dénonciation de crime et d´atteinte sexuelle sur mineur (*), Mgr Gaillot ne semblait en effet pas au courant des [nouveaux] agissements du père Vadeboncœur à Lieurey [Eure]. Pour autant, l'attitude des évêques français suscite l´étonnement au Québec : « Comment a-t-on pu le nommer en paroisse ? s´interroge Jacques Côté, responsable de la communication de l´archevêché de Québec. Nous avons adopté chez nous le principe de la tolérance zéro : tout prêtre soupçonné de pédophilie est aussitôt signalé à la justice. »


* Déclaration de Mgr Pierre Pican, évêque de Bayeux-Lisieux

Après avoir pris le temps de réfléchir, j'ai décidé de ne pas faire appel de la décision du tribunal correctionnel de Caen, en date du 4 septembre 2001, qui m'a condamné à trois mois de prison avec sursis pour non-dénonciation d'atteintes sexuelles sur mineurs.
Ce procès extrêmement complexe dépassait ma propre personne. Essayant de prendre de la distance par rapport à ce que j'éprouve, je constate qu'ont été réaffirmés des principes de première importance touchant le respect des personnes, à travers l'option de conscience et le secret professionnel des ministres du culte.
Le jugement comporte pourtant, il faut le regretter, une restriction du champ du secret professionnel qui ne laisse pas d'inquiéter. Une telle remise en cause -même partielle- de la jurisprudence admise et constamment réaffirmée jusqu'ici demanderait que je fasse appel.
Je ne saurais pourtant oublier l'épreuve subie par les victimes de l'abbé Bissey. Même si certains ne l'ont pas perçu, j'ai constamment été habité par l'ampleur de leur drame, et les souffrances qui se sont exprimées lors des procès m'ont marqué en profondeur. Aussi ai-je voulu manifester ma volonté d'apaisement à l'égard des parties civiles et ne pas raviver les blessures, au cours d'un nouveau procès qui se déroulerait devant la cour d'appel de Caen. J'ai aussi beaucoup pensé à mon diocèse, à l'Eglise, à toutes celles et ceux qui, de bien des manières, ont été affectés par cette situation.
C'est pourquoi, dans l'espoir de contribuer au retour de la paix dans les consciences et dans les esprits, j'ai décidé de ne pas faire appel.
A Bayeux, le 7 septembre 2001
+ Pierre PICAN
Évêque de Bayeux et Lisieux

* * * * *
" En 2003, la Conférence des évêques de France publie une brochure, largement diffusée, intitulée Lutter contre la pédophilie. L’injonction est claire  : «  Lorsque quelqu’un a connaissance d’un crime (…), qu’il soit prêtre, éducateur laïque ou membre de la famille de la victime, la dénonciation s’impose.  » Le code pénal [article 434-3] punit d’ailleurs de trois ans de prison la non-dénonciation de tels faits. "" Pédophilie : il y a loin du pardon à la justice ", LE MONDE | 28.03.2016

§ : L'affaire Barbarin

" Relativement épargnée, ces dernières années, par le scandale de la pédophilie, l’Église catholique en France est à la veille d’une grande tempête. En cause, l’un des plus puissants et médiatiques évêques de l’Hexagone, le cardinal-archevêque de Lyon, Philippe Barbarin.
« Dans les prochains jours, des plaintes vont être déposées contre lui pour non-dénonciation de faits de pédophilie », indique à Libération, François Devaux, le président de l’association La Parole libérée. Fondée en décembre dernier, elle regroupe les personnes qui auraient été victimes du père Bernard Preynat, un prêtre du diocèse de Lyon, mis en examen le 27 janvier pour « agressions sexuelles sur mineurs de moins de quinze ans par personne ayant autorité ». " (Libération, 12 février 2016).

Le parquet de Lyon a ordonné une enquête préliminaire pour "non-dénonciation de crime" et "mise en danger de la vie d'autrui" en marge de l'affaire d'un prêtre, mis en examen pour des agressions sexuelles sur de jeunes scouts entre 1986 et 1991, a-t-on appris vendredi de source judiciaire.
L'enquête a été ouverte à la suite d'un signalement de victimes du religieux, mettant en cause plusieurs responsables du diocèse de Lyon, parmi lesquels le cardinal Philippe Barbarin qu'ils accusent de ne pas avoir dénoncé à la justice les agissements passés de ce prêtre.
04/03/2016 18:39:01 - Lyon (AFP) - © 2016 AFP


" Le cardinal Barbarin, nommé archevêque de Lyon en 2002 affirma, globalement, ne pas avoir « couvert » d'actes pédophiles: « Je veux dire avec la plus grande force que jamais, jamais, jamais je n'ai couvert le moindre acte de pédophilie. »

Il rappela ensuite que la décision de remettre ce prêtre en service en 1991, après une suspension de six mois (suivant une dénonciation interne des parents d'enfants victimes), avait été prise par son «prédécesseur, le cardinal Decourtray», précisant que «jamais on n'aurait pris une telle décision aujourd'hui.»

Il indiqua, une fois au courant des faits, avoir demandé à ce prêtre une déposition «écrite» qu'il avait alors «transmise» à Rome, où on lui a conseillé d'écarter ce prêtre, même non visé à l'époque par des plaintes, ce qu'il a alors fait.

Il a reconnu avoir «confiance» en la parole de ce prêtre qui lui a garanti « n'avoir jamais recommencé » après 1991. Justifiant ainsi le fait qu'il l'avait maintenu en fonction malgré ce passé. " (http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2016/03/15/01016-20160315ARTFIG00211-le-cardinal-barbarin-nie-avoir-couvert-des-faits-de-pedophilie.php)

Barbarin, 18 novembre 2016 :
" Je demande pardon devant Dieu et devant tout notre diocèse, de n’avoir pas pris les devants pour enquêter comme il aurait fallu dès qu’un premier témoignage m’était parvenu, pardon de ne pas avoir sanctionné immédiatement un prêtre pour ses actes anciens, très graves et clairement indignes de son ministère, pardon de mes erreurs de gouvernance qui ont occasionné un tel scandale. "
" En ce vendredi 18 novembre 2016, en la Primatiale Saint-Jean, le cardinal Barbarin a célébré une Messe de réparation à l’intention des victimes de pédophilie de la part des membres du clergé. Voici le texte intégral qu’il a prononcé au seuil de cette célébration. "
« En réparation de la profanation du corps vivant du Christ »

Mgr Lalanne hésite à qualifier la pédophilie de « péché »

Interrogé, mardi [5 avril 2016] sur RCF, Mgr Stanislas Lalanne a soutenu que la pédophilie était « un mal » mais pas forcément « de l’ordre du péché », entraînant la condamnation du collectif de victimes La Parole libérée et l’incompréhension à l’intérieur et à l’extérieur de l’Église.

Qu’a dit Mgr Lalanne ?

« La pédophilie est un mal. Est-ce que c’est de l’ordre du péché ? Ça, je ne saurai pas dire, c’est différent pour chaque personne. Mais c’est un mal et la première chose à faire, c’est de protéger les victimes ou les éventuelles victimes ». Ces mots, prononcés mardi 5 avril par Mgr Stanislas Lalanne, évêque de Pontoise, sur les ondes de RCF, ont soulevé très vite une polémique. D’autant que plusieurs auditeurs étaient revenus en direct sur ces propos pour les contester.

Dès le lendemain, la Parole libérée, le collectif qui rassemble les victimes du P. Preynat -ce prêtre de la banlieue lyonnaise auquel il est reproché d’avoir abusé une soixantaine de scouts dans les années 1980 – a fait part dans un communiqué de sa « très vive émotion ».

« Après le fameux’Grâce à Dieu ! Les faits sont prescrits !’ de Mgr Philippe Barbarin, les propos de Mgr Lalanne résonnent à nouveau de manière violente et dégradante pour les victimes d’actes de pédophilie », estime l’association, accusant l’Église de « maladresses et d’amateurisme » dans sa communication, empêchant de percevoir en elle « la référence morale (qu’elle) se doit d’incarner ». Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes, catholiques ou non, se sont émus et interrogés.
Les propos de Mgr Lalanne sont-ils justes sur un plan théologique ?

D’un point de vue théologique, les affirmations de Mgr Lalanne peuvent s’expliquer. « On considère qu’il y a péché lorsqu’il y a un acte moral responsable », souligne le P. Laurent Lemoine, dominicain et théologien moraliste, auteur de plusieurs documents sur la pédophilie. « Or, parmi les personnes coupables de faits de pédophilie, beaucoup sont de grands pervers ».

Pourtant, il semble aujourd’hui impossible, au vu du traumatisme collectif et de l’ampleur des dégâts causés, de s’en tenir à ces distinctions théologiques. « La pédophilie est un délit, et c’est même un crime. Or, quels crimes ne sont-ils pas des péchés  ? La question est complexe », avance le P. Lemoine, pour qui la réflexion du clergé sur la pédophilie doit absolument intégrer l’aspect civil de tels actes.

Aussi, des propos tels que ceux de l’évêque de Pontoise, s’ils ne sont pas absolument faux d’un point de vue formel, « ne sont plus audibles », assure le P. Lemoine, d’autant que la société a l’impression que la parole de l’Église est beaucoup plus claire en termes de bien et de mal sur d’autres sujets moraux.

Que répond Mgr Lalanne  ?

« Les faits de pédophilie sont une faute objective mais le péché est d’un autre ordre », se défend pour La Croix Mgr Lalanne, qui redit cependant « leur extrême gravité et la nécessité de sanctions ». « Pour les prêtres pédophiles, le chemin doit permettre de reconnaître le mal commis, de passer du déni à la reconnaissance de son acte comme un péché », convient-il.

Jean-Paul II lui-même, lorsque le scandale de la pédophilie avait explosé aux États-Unis au début des années 2000, avait qualifié les abus sexuels de « péché détestable aux yeux de Dieu ». Quelques années plus tard, Benoît XVI avait parlé de « péché grave », preuve qu’il est possible de qualifier clairement ces actes.

Pour le P. Lemoine, ce débat montre le flou qui plane encore sur la question. « Le Catéchisme de l’Église catholique se penche sur l’homosexualité mais ne dit rien de la pédophilie, pointe le dominicain, il serait peut-être temps de se mettre à la page ».
Marie Malzac

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Loiret : affaire de prêtres pédophiles signalée
Par Lefigaro.fr avec AFP
Publié le 18/04/2016


L'évêque d'Orléans, Mgr Jacques Blaquart, a retiré ses derniers ministères à un prêtre de la ville, mis en examen en 2012 pour des faits de nature pédophile après un signalement de l'Église, a-t-il révélé aujourd'hui lors d'une conférence de presse. Les faits remonteraient à 1993 et se seraient produits à l'occasion d'un camp du Mouvement eucharistique des jeunes (MEJ) où officiait ce prêtre en tant qu'aumônier, dans le sud-ouest de la France, a précisé l'évêque, qui a agi après avoir été contacté par une victime en 2011.

"J'ai aussitôt saisi le procureur. L'enquête est en cours et aurait mis en évidence huit ou neuf cas d'attouchements sur mineurs, sur des victimes âgées d'une douzaine d'années", a ajouté Mgr Blaquart. Le procès de ce prêtre, aussi aumônier auprès des Scouts d'Europe, pourrait avoir lieu l'an prochain. Selon l'évêque, il a reconnu les faits.

Les prédécesseurs de Mgr Blaquart avaient eu connaissance de ses agissements et avaient pris "des mesures conservatoires" contre le prêtre, aujourd'hui âgé de 65 ans, pour éviter qu'il soit seul en contact avec des jeunes, mais ils n'avaient pas porté plainte, a-t-il ajouté. L'évêque a récemment supprimé les derniers ministères de ce prêtre. "J'aurais dû le faire plus tôt", a-t-il ajouté. Bien avant les mesures annoncées la semaine dernière par la Conférence des évêques de France, le diocèse d'Orléans, à la demande de l'évêque, a été le premier à mettre en place une cellule d'écoute pour les victimes de prêtres pédophiles.

Quatre appels ont été reçus au cours de la première année de fonctionnement, mais depuis un mois, le rythme s'est accéléré, avec 12 appels depuis mars. Quatre contacts concernent des faits anciens commis dans le Loiret par des prêtres décédés. Les autres appels concernent d'autres diocèses et les contacts ont été aussitôt transmis aux évêques concernés.

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GOLIAS : " Rome vacille sur le scandale [du cardinal George] Pell " (Golias Hebdo n° 488, 6-12 juillet 2017)

Après avoir bénéficié d'un «classement sans suite» dans l'affaire Bernard Preynat, le cardinal Philippe Barbarin devait être jugé en avril 2018 pour non-dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs commises par un prêtre dans son diocèse de Lyon il y a 25 ans. En raison d'une difficulté de procédure, ce procès est reporté à janvier 2019.

Dans sa fonction précédente d'évêque, Mgr Ladaria, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, avait conseillé par écrit au cardinal Barbarin - qui l'avait consulté sur le cas Preynat - de « prendre des mesures disciplinaires adéquates tout en évitant le scandale public ». Cette lettre, saisie en perquisition, se retourne contre lui : Mgr Ladaria est aujourd'hui visé pour « complicité » pour n'avoir pas ordonné au cardinal Barbarin de saisir la justice civile.


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L'abbé Pierre de Castelet et l'ancien évêque d'Orléans, Mgr André Fort, comparaissent mardi 30 octobre 2018  devant le tribunal correctionnel. Le premier est accusé d'actes de pédophilie sur mineurs, l'autre de non-dénonciation.

Ce procès intervient à quelques jours de la Conférence des évêques de France (CEF) à Lourdes où sera justement abordée la douloureuse question des abus sexuels dans l'Église. L'abbé Pierre de Castelet, accusé d'actes de pédophilie sur mineurs, et l'ancien évêque d'Orléans, Mgr André Fort, poursuivi pour non-dénonciation, comparaissent ensemble ce mardi devant le tribunal correctionnel. Le renvoi d'un évêque devant la justice est exceptionnel. Lors d'un précédent procès en 2001, l'évêque de Bayeux, Mgr Pierre Pican, avait été condamné à 3 mois de prison avec sursis pour non-dénonciation d'actes pédophiles.

Il est reproché à l'abbé Pierre de Castelet, 69 ans, des attouchements sur des mineurs de 15 ans lors d'un camp organisé pendant l'été 1993. Quinze ans plus tard, l'un des participants, Olivier Savignac, adressait une lettre à l'évêché, affirmant avoir été victime d'attouchements. Mgr André Fort, en charge du diocèse d'Orléans de 2002 à 2010, n'avait pas transmis la lettre à la justice et s'était contenté d'éloigner le prêtre de tout contact avec les jeunes. Ce n'est qu'après l'arrivée du nouvel évêque, Jacques Blaquart, que la justice sera saisie. Le père de Castelet a été mis en examen en 2012 pour agressions sexuelles et Mgr Fort en 2017 pour ne pas avoir dénoncé ces actes. (Le Figaro).

L'ancien évêque d'Orléans André Fort a été condamné le 22 novembre 2018 en correctionnelle à huit mois de prison avec sursis pour n'avoir pas dénoncé les faits de pédophilie du père Pierre de Castelet qui a lui écopé de trois ans de prison dont un avec sursis. (Le Figaro)




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dimanche 19 septembre 2021

INDEX NIETZSCHE (10/16) : LE PETIT NOMBRE, LE TROUPEAU, LES RATÉS

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Flock of sheep


Fragments posthumes 1870-1873,

U I 2b, fin 1870 - avril 1871 : 7[123] : " Seule une toute petite troupe d’élus peut être initiée jusqu’aux degrés supérieurs ; la grande masse restera éternellement arrêtée sur le parvis. " [Cf Gustave Flaubert, Bouvard et Pécuchet, VIII : « Si l’individu ne peut rien savoir, pourquoi tous les individus en sauraient-ils davantage ? Une erreur, fût-elle vieille de cent mille ans, par cela même qu’elle est vieille, ne constitue pas la vérité ! La foule invariablement suit la routine. C’est, au contraire, le petit nombre qui mène le progrès. »]
7[183] : " Est-ce que ce qui est utile à ceux de la multitude [die Vielen] est une fin ? Ou bien ceux de la multitude ne sont-ils qu’un moyen ? "

U I 5a, hiver 1870-1871 - automne 1872 : [58] : " La masse ne produit pas l’individu, au contraire elle lui oppose une résistance. "
[83] :

U I 4a, 1871 : [70] : l’enseignement classique n’est de toute façon fécond que pour le petit nombre.

U II 2, été-automne 1873 : 29[40] : " Les masses ne sont à considérer que 1) comme des copies brouillées des grands hommes, tirées sur du mauvais papier et avec des plaques usées, 2) comme des obstacles à l’action des grands, 3) comme des instruments des grands. Pour le reste, que le diable les emporte. " [Die Massen sind nur zu betrachten einmal 1) als verschwimmende Copien der grossen Männer, auf schlechtem Papier und mit abgenutzten Platten 2) als Widerstand gegen die Grossen 3) als Werkzeug der Grossen. Im Übrigen hole sie der Teufel.]


Considérations inactuelles II, (1874)

De l’utilité et des inconvénients de l’histoire pour la vie,
§ 1 : « Observe le troupeau qui paît sous tes yeux : il ne sait ce qu’est hier ni aujourd’hui, il gambade, broute, se repose, digère, gambade à nouveau, et ainsi du matin au soir et jour après jour, étroitement attaché par son plaisir et son déplaisir au piquet de l’instant, et ne connaissant pour cette raison ni mélancolie ni dégoût. C’est là un spectacle éprouvant pour l’homme, qui regarde, lui, l’animal du haut de son humanité, mais envie néanmoins son bonheur  – car il ne désire rien d’autre que cela : vivre comme un animal, sans dégoût ni souffrance, mais il le désire en vain car il ne le désire pas comme l’animal. » [Betrachte die Heerde, die an dir vorüberweidet: sie weiss nicht was Gestern, was Heute ist, springt umher, frisst, ruht, verdaut, springt wieder, und so vom Morgen bis zur Nacht und von Tage zu Tage, kurz angebunden mit ihrer Lust und Unlust, nämlich an den Pflock des Augenblickes und deshalb weder schwermüthig noch überdrüssig. Dies zu sehen geht dem Menschen hart ein, weil er seines Menschenthums sich vor dem Thiere brüstet und doch nach seinem Glücke eifersüchtig hinblickt — denn das will er allein, gleich dem Thiere weder überdrüssig noch unter Schmerzen leben, und will es doch vergebens, weil er es nicht will wie das Thier.] »


Opinions et sentences mêlées, 1879,
§ 295 : " Affirmer est plus sûr que démontrer. Une affirmation agit avec plus de force qu’un argument, du moins sur la majorité des gens ; car l’argument éveille la méfiance. C’est pourquoi les tribuns populaires cherchent à consolider les arguments de leur parti au moyen d’affirmations. "


Fragments posthumes, 1879-1881,

N IV 1, juillet 1879 :
41[43] : " La communitude s'installe d'abord dans la communauté. " [Die Gemeinheit entsteht erst in der Gemeinschaft.]

NV 3, été 1880 :
4[78] : « Pour la morale, l’humanité inférieure de la foule possède une valeur qu’elle paye sans hésiter au prix de l’humanité supérieure des individus isolés » [Für die Moral besitzt die geringere Menschlichkeit einer Masse einen Werth, den sie mit der höheren Menschlichkeit Einzelner zu bezahlen kein Bedenken trägt: ebenso in Betreff der Gesundheit, des Glücks]

N V 4, automne 1880 :
6[163] : « Si l’on souhaite des hommes ordinaires et égaux, c’est parce que les faibles redoutent l’individu fort et préfèrent un affaiblissement général à un développement dirigé vers l’individuel. Je vois dans la morale actuelle un artifice flatteur pour dissimuler l’affaiblissement général : tout comme le christianisme voulait affaiblir et ramener à l’égalité les hommes forts et intelligents. »

M III 1, printemps-automne 1881 :
[57] : la masse MÉPRISE  tout ce qui est ordinaire, léger, petit.


Gai Savoir, 1882,
III,
§ 174 : il est indifférent qu’une seule opinion soit imposée au troupeau ou que cinq opinions lui soient permises – quiconque s’écarte des cinq opinions fondamentales aura toujours contre lui le troupeau tout entier.

Fragments posthumes 1882-1883,

N V 9c. N VI 1b. N V 8, novembre 1882 — février 1883, 4[38] : " Voulez-vous avoir une vie facile ? Alors restez toujours avec le troupeau et perdez-vous dans le troupeau. " [Willst du das Leben leicht haben, so bleibe immer bei der Heerde. Vergiß dich über der Heerde! Liebe den Hirten und ehre das Gebiß seines Hundes!]


Fragments posthumes 1884-1886,

W I 1, printemps 1884 : [440] : Le spectacle des masses et de ceux qui s’adressent aux masses [der Lehrer der Massen] rend sombre !
[484] : le jugement de valeur selon les critères de la foule tient encore trop de place même chez le sage !

W I 2, été-automne 1884 : 26[155] : on ne devient pas un conducteur, si l’on n’a pas d’abord été une bonne foi exclu du troupeau.
26[185] : Un individu discrédité et mis au ban par le troupeau est du même coup dispensé d’observer l’esprit de mensonge, qui fait partie des premiers devoirs de la conscience du troupeau.

Z II 5a, été-automne 1884 : 27[17] : J’enseigne : le troupeau essaye de maintenir un type et se garde des deux côtés, aussi bien contre les spécimens de dégénérescence (criminels, etc.) que contre ceux qui s’élèvent au dessus du niveau fixé. La tendance du troupeau est dirigée vers le repos et la conservation, il n’y a rien de créateur en elle.

N VII 1, avril-juin 1885 : [77] : Grande louange pour le christianisme : il est la véritable religion du troupeau.

W I 3a, mai-juillet 1885 : 35[34] : Aucune de toutes ces bêtes de troupeau, lourdaudes, aux consciences inquiètes — car c'est ce qu'elles sont toutes, les unes comme les autres — ne veut se rendre compte qu'il y a une hiérarchie des hommes, et que par conséquent une morale unique pour tous constitue un préjudice pour l'homme le plus haut, que ce qui est juste pour l'un peut ne l'être nullement pour l'autre. [Niemand von allen diesen schwerfälligen, im Gewissen beunruhigten Heerden-Thieren — denn das sind sie allesammt — will etwas davon wissen, daß es eine Rangordnung der Menschen giebt, folglich Eine Moral für Alle eine Beeinträchtigung der höchsten Menschen ist, daß, was dem Einen billig ist, durchaus noch nicht dem Anderen es sein kann.]
Le bonheur du plus grand nombre est un idéal à vomir pour quiconque a la distinction de ne pas faire partie du grand nombre. [vielmehr das „Glück der Meisten“ für Jeden ein Ideal zum Erbrechen ist, die Auszeichnung hat, nicht zu den Meisten zu gehören.]
W I 8, automne 1885 - automne 1886 : 2[168] : le combat de la multitude contre la minorité, du banal contre l’exceptionnel, des faibles contre les forts.
[179] : avec sa morale, le christianisme, en tant qu’idéal plébéien, aboutit à nuire aux types les plus forts, les plus noblement conformés, les plus virils, et favorise l’espèce des hommes du troupeau : il constitue une préparation à la manière de penser démocratique.


Par-delà Bien et mal (1886),

II " L'esprit libre ", § 29 : Être indépendant est l’affaire d’un très petit nombre ; c’est un privilège des forts.
§ 44 : Ce qu'ils aimeraient réaliser de toutes leurs forces c'est le bonheur du troupeau pour tout le monde, le bonheur du troupeau paissant sa verte prairie, dans la sécurité, le bien-être, l'universel allègement de l'existence.

§ 62 :

V " Contribution à l'histoire naturelle de la morale ", § 201 : Tant que l'utilitarisme qui réside dans les jugements moraux ne visera que ce qui est utile au troupeau, tant qu'il n'aura en vue que la conservation de la communauté et que l'on taxera d'immoralité uniquement ce qui paraîtra la mettre en danger, on ne pourra encore parler d'une " morale de l'amour du prochain ". [...] L' " amour du prochain " est toujours chose secondaire, en partie conventionnelle, arbitraire et illusoire en comparaison de la peur du prochain.
§ 202 :La morale est aujourd’hui en Europe la morale du troupeau.
§ 203 : déchéance et rapetissement de l’homme transformé en bête de troupeau

§ 257 :

IX " Qu’est-ce qui est aristocratique ? ", § 260 : Il y a morale des maîtres et morale des esclaves.[Cf M III 4b, printemps-été 1883 : [22]]
Par-delà Bien et Mal, IX " Qu’est-ce qui est aristocratique ? ", § 263 : « On atteint beaucoup quand on a réussi à inculquer à la grande masse (les esprits creux et les étourdis de toutes sortes), qu'ils n'ont pas le droit de toucher à tout, qu'il y a des expériences sacrées devant lesquelles ils ont à retirer leurs chaussures et à surveiller leurs mains sales, — c'est là à peu près leur plus haut degré d'humanité. Inversement, il n'est peut-être rien de plus répugnant, chez les prétendus cultivés, les croyants aux " idées modernes ", que le manque de pudeur, l'insolente familiarité avec lesquels ils touchent, lèchent et palpent tout ; et il est possible qu'on trouve aujourd'hui dans le peuple, dans le bas peuple et notamment chez les paysans, relativement plus de distinction dans le goût et de tact dans le respect, qu'au sein de ce demi-monde de l'esprit lisant les journaux, les Cultivés. »
Belle rencontre avec Dostoïevski :


§ 268 : Les hommes ordinaires, les hommes qui se ressemblent entre eux ont été et sont toujours avantagés ; l’élite, les plus raffinés, les plus singuliers, les plus difficiles à comprendre demeurent souvent seuls, succombent aux accidents du fait de leur isolement et se perpétuent rarement.
§ 284 : le commerce des hommes, — en « société » — est inévitablement malpropre. Peu importe où, quand, comment, toute communauté rend — « commun ».


Fragments posthumes 1886-1887,


N VII 3, été 1886 - automne 1887 : [108] : Erreur fondamentale : prendre le troupeau pour but et non les individus isolés ! Le troupeau est un moyen, rien de plus ! Mais aujourd’hui, on tente de concevoir le troupeau comme un individu et de lui attribuer un rang supérieur à celui de l’individu.
On tente de caractériser ce qui rend moutonnier, les sentiments de sympathie, comme le côté le plus précieux de notre nature !

Mp XVII 3b, fin 1886 – printemps 1887 : [6] : Ma philosophie vise à la hiérarchie : non à une morale individualiste. Le sens du troupeau doit régner dans le troupeau – mais ne pas déborder au delà. […] si l’on ressent ses actions altruistes et désintéressées comme un danger et une erreur pour soi-même, on ne fait pas partie du troupeau.
[9] : Le phénomène fondamental : d’innombrables individus SACRIFIÉS au profit d’un petit nombre, en tant qu’ils le rendent possible.


La Généalogie de la morale (1887),

III "Que signifient les idéaux ascétiques ?",
§ 18 : la formation des troupeaux est un progrès essentiel et une victoire dans la lutte contre la dépression. [die Heerdenbildung ist im Kampf mit der Depression ein wesentlicher Schritt und Sieg [...] Partout où il y a troupeau, c’est l’instinct de faiblesse qui a voulu le troupeau et la sagesse du prêtre qui l’a organisé. Par nécessité naturelle les forts ont tendance à se séparer autant que les faibles ont tendance à s’unir ;si les uns s'associent ce n'est qu'en vue d'une action agressive commune, d'une satisfaction commune de leur volonté de puissance, et non sans avoir à surmonter individuellement de grandes répugnances ; les faibles au contraire, en s'associant, prennent plaisir précisément à cette association. [wo es Heerden giebt, ist es der Schwäche-Instinkt, der die Heerde gewollt hat, und die Priester-Klugheit, die sie organisirt hat. Denn man übersehe dies nicht: die Starken streben ebenso naturnothwendig aus einander, als die Schwachen zu einander; wenn erstere sich verbinden, so geschieht es nur in der Aussicht auf eine aggressive Gesammt-Aktion und Gesammt-Befriedigung ihres Willens zur Macht, mit vielem Widerstande des Einzel-Gewissens; letztere dagegen ordnen sich zusammen, mit Lust gerade an dieser Zusammenordnung]


Fragments posthumes 1887-1888,

Mp XVII 3c, été 1887 : [4] : haine des médiocres envers les exceptions, du troupeau envers les indépendants.

W II 2, automne 1887 : concept de la dégénérescence dans les deux cas : lorsque le troupeau se rapproche des qualités de l’être solitaire et celles-là des qualités du troupeau, – bref, lorsqu’elles se rapprochent.

W II 3, novembre 1887 - mars 1888 :
[127] : raison de la séparation aristocratique par rapport à la masse
[140] : contre les idéaux du troupeau, je défend l’aristocratisme
[341] : dans un troupeau l’égalité peut régner

W II 5, printemps 1888 : 14[123] : Les plus forts et les plus heureux sont faibles quand ils ont contre eux les instincts organisés du troupeau, la lâcheté des faibles, le surnombre [...] Aussi curieux que cela paraisse : il faut toujours armer les forts contre les faibles ; les chanceux contre les malchanceux ; les sains contre les dépravés et les congénitalement tarés. [die Stärksten und Glücklichsten sind schwach, wenn sie organisirte Heerdeninstinkte, wenn sie die Furchtsamkeit der Schwachen, der Überzahl gegen sich haben. [...] So seltsam es klingt: man hat die Starken immer zu bewaffnen gegen die Schwachen; die Glücklichen gegen die Mißglückten; die Gesunden gegen die Verkommenden und Erblich-Belasteten.] 

W II 6a, printemps 1888 : 15[79] : Les valeurs des faibles ont le dessus parce que les forts les ont reprises, pour gouverner grâce à elles … [NB NB. Die Werthe der Schwachen sind obenan, weil die Starken sie übernommen haben, um damit zu leiten…]

Ecce Homo, Pourquoi je suis si avisé,
§ 10 : « Je n’ai jamais souffert que de la "multitude" [Vielsamkeit] »

LES RATÉS (Miβrathenen)


Fragments posthumes, 1881-1884,

M III 5, automne 1881 : [16] : le malade et le criminel ne doivent pas être reconnus aptes à se reproduire.

W I 1, printemps 1884 : 25[243] : Que les premiers et plus réussis exemplaires ne soient pas désavantagés par égard pour les ratés (c’est-à-dire la masse).
Destruction [Vernichtung] des ratés - pour cela il faut s'émanciper de la morale qui a eu cours jusqu'ici. [Erster Grundsatz: keine Rücksicht auf die Zahl: die Masse, die Elenden und Unglücklichen gehen mich wenig an — sondern die ersten und gelungensten Exemplare, und daß sie nicht aus Rücksicht für die Mißrathenen (d.h. die Masse) zu kurz kommen.
Vernichtung der Mißrathenen — dazu muß man sich von der bisherigen Moral emancipiren.]

25[335] : – atteindre cette monstrueuse énergie de la grandeur, pour pouvoir, par l'éducation et d'autre part l'anéantissement [Vernichtung] de millions de ratés [eugénisme ?], former l'homme futur, et ne pas mourir de la douleur que l'on crée, et qui n'a jamais eu d'équivalent ! – [— jene ungeheure Energie der Größe zu gewinnen, um, durch Züchtung und anderseits durch Vernichtung von Millionen Mißrathener, den zukünftigen Menschen zu gestalten und nicht zu Grunde zu gehen an dem Leid, das manschafft, und dessen Gleichen noch nie da war! —]

[Passage remarqué et commenté par l’historien allemand Ernst Nolte (1923-2016) : référence malheureusement perdue]


– cette disposition des ratés à se sacrifier : c’est le sens des Ordres qui font vœu de chasteté. [— Gesinnung der Mißrathenen, sich zu opfern: das der Sinn der Orden, welche sich Keuschheit geloben.]

25[343] : La grande majorité des êtres humains sont sans droit à l'existence, mais un malheur pour les êtres supérieurs : je n'accorde pas encore le droit aux ratés. Il y a aussi des peuples ratés. [Die allermeisten Menschen sind ohne Recht zum Dasein, sondern ein Unglück für die höheren: ich gebe den Mißrathenen noch nicht das Recht. Es giebt auch mißrathene Völker.]

25[345] : Causes du pessimisme

[...] les compatissants et les âmes sensibles : absence de la dureté – le ménagement des ratés

25[382] : Le raté se conserve beaucoup plus longtemps et détériore la race : c'est pourquoi l'homme par comparaison avec les animaux est l'animal le plus malade. [So erhält sich das Mißrathene viel länger und verschlechtert die Rasse: weshalb der Mensch, im Vergleich zu den Thieren, das krankhafteste Thier ist.]

25[383] : Je ne permets qu'aux hommes pleinement réussis de philosopher sur la vie. Mais il y a des hommes et des peuples ratés : il faut leur clouer le bec. Il faut en finir avec le Christianisme – c'est le plus grand blasphème qu'il y ait jamais eu sur la Terre et dans la vie – il faut clouer le bec à ces hommes et à ces peuples ratés. [Ich erlaube nur den Menschen, die wohlgerathen sind, über das Leben zu philosophiren. Aber es giebt mißrathene Menschen und Völker: denen muß man das Maul stopfen. Man muß ein Ende machen mit dem Christenthum — es ist die größte Lästerung auf Erde und Erdenleben, die es bisher gegeben hat — man muß mißrathenen Menschen und Völkern das Maul stopfen.]

25[385] : La condamnation du corps est typique du mélange raté, et de même la condamnation de la vie : signe auquel on reconnait les vaincus.

25[413] : Les consolations qui renvoient à l’au-delà ont l’intérêt de maintenir en vie beaucoup de ceux qui ont de la peine à vivre : de propager les ratés : ce qui (comme pour les mélanges de races) peut être en soi plein d’intérêt, dans la perspective où une race finit par devenir pure.

Il est dans le caractère de la vie que la majorité des exemplaires deviennent des ratés.

25[438] : Quel sens peut bien avoir ce que des religions entières répètent : « tout est mauvais, faux et méchant ! » Cette condamnation de l’ensemble du processus ne peut être qu’un jugement de ratés !

Les ratés, dira-t-on, pourraient être ceux qui souffrent le plus, les plus sensibles ? Les satisfaits pourraient ne pas valoir grand-chose ?

25[485] : " Pour faire la différence entre le réussi et le raté, le corps est le meilleur conseiller, du moins c’est lui qu’on peut étudier le mieux. "



Par-delà Bien et mal (1886),

III "Le phénomène religieux,
§ 62 : " On trouve dans l’espèce humaine, comme dans toutes les autres espèces animales, un excédent d’individus ratés, malades, dégénérés, infirmes, d’êtres voués à la souffrance ; chez les hommes aussi les réussites constituent toujours l’exception, et, compte tenu du fait que l’homme est l’animal dont le caractère n’est pas encore fixé, l’exception rarissime. "


Fragments posthumes 1886-1888,
N VII 3, été 1886 - automne 1887 : [71] : 10 : la morale protégeait du nihilisme les ratés en conférant à chacun une valeur infinie, une valeur métaphysique
12 : le nihilisme comme symptôme de ce que les ratés n’ont plus de consolation
14 : Que signifie aujourd’hui « raté » ? C’est avant tout physiologique : [ce n’est] plus politique.

W II 6a, printemps 1888 : 15[110] : " L’espèce a besoin de la disparition des ratés, des faibles, des dégénérés : mais vers eux précisément s’est tourné le christianisme. " [Die Gattung braucht den Untergang der Mißrathenen, Schwachen, Degenerirten: aber gerade an sie wendete sich das Christenthum,]


L’Antéchrist, 1888,


§ 2 : Périssent les faibles et les ratés ! Premier principe de notre philanthropie. Et il faut même les y aider. [les première et troisième phrases sont commentées par Alexandre Lacroix dans le N° 1 de philosophie MAGAZINE]

[Die Schwachen und Missrathnen sollen zu Grunde gehn: erster Satz unsrer Menschenliebe. Und man soll ihnen noch dazu helfen.]

" Qu’est-ce qui est plus nuisible qu’aucun vice ? La compassion active pour tous les ratés et les faibles – le christianisme …" [Was ist schädlicher als irgend ein Laster? — Das Mitleiden der That mit allen Missrathnen und Schwachen — das Christenthum…]


Ecce homo, 1908 [1888],
" L'origine de la tragédie ",  § 4 : " Ce nouveau parti de la vie qui prendra en main la plus haute de toutes les tâches, l'éducation supérieure de l'humanité, y compris l'extinction sans ménagements de tout ce qui est dégénéré et parasitaire, rendra à nouveau possible sur Terre ce trop-plein de vie dont, à son tour, le dionysisme doit nécessairement sortir. " [Jene neue Partei des Lebens, welche die grösste aller Aufgaben, die Höherzüchtung der Menschheit in die Hände nimmt, eingerechnet die schonungslose Vernichtung alles Entartenden und Parasitischen, wird jenes Zuviel von Leben auf Erden wieder möglich machen, aus dem auch der dionysische Zustand wieder erwachsen muss.]


INDEX NIETZSCHE (4/15) : LES SOCIALISTES

N.B. SUR MES INDEXATIONS DE NIETZSCHE

Les notes et les indications entre [ ] sont de MOI. La traduction est le plus souvent revue vers une plus grande littéralité à partir de celle des éditions Gallimard (Paris), Œuvres philosophiques complètes. Traducteurs : Anne-Sophie Astrup, Henri-Alexis Baatsch, Jean-Louis Backès, Pascal David, Maurice de Gandillac, Jean Gratien, Michel Haar, Cornélius Heim, Jean-Claude Hémery, Julien Hervier, Isabelle Hildenbrand, Pierre Klossowski, Philippe Lacoue-Labarthe, Jean Launay, Marc B. de Launay, Jean-Luc Nancy, Robert Rovini, Pierre Rusch.


Tous les textes allemands sont accessibles sur Nietzsche Source
 
INDEX NIETZSCHE (11/16) : LA SEXUALITÉ