Extrait de mon Dictionnaire français de l'homosexualité masculine.
NEUTRE
« En une autre pièce, je voyais ce même homme étendu tout nu sur une table, et plusieurs à l’entour de lui qui avaient diverses sortes de serrements, et faisaient tout ce qui était possible pour le faire devenir femme : mais à ce que j’en pouvais juger par la suite de l’histoire il demeurait du genre neutre. […] Tout le langage, et tous les termes des Hermaphrodites sont de même que ceux que les Grammairiens appellent du genre commun, et tiennent autant du mâle que de la femelle. »
Anonyme, L’Ile des Hermaphrodites, 1605.
Ce genre neutre qui existait dans la langue latine (comme en allemand et en russe) fut le prétexte de bien des plaisanteries ; mais on avait pu également rattacher l’amour masculin au genre masculin (cf MASCULIN).
Cyrano de Bergerac reprocha à un impuissant :
« Vous n’êtes ni masculin, ni féminin, mais neutre »
Le Pédant joué, I, 1.
« Si la multiplication subite des moines qui ont envahi l’espace chrétien ne préparait pas aux merveilles de la procréation des êtres neutres, on ne croirait pas à la possibilité de leur existence : un controversiste prétend que les jésuites ont répandu des missionnaires dans le monde, pour fortifier leurs prosélytes et faire de nouvelles conversions. On promet une couronne civique à chaque femme qui aura reçu l’abjuration d’un membre de cette secte ; elle est recommandée surtout aux femmes aimables, qui doivent vaincre leur répugnance pour être utiles à l’humanité. »
Théveneau de Morande, Le Philosophe cynique, 1771 [Ce texte se trouve dans un volume intitulé Le Gazetier cuirassé].
« Combien de gens qui se croient les coryphées de leur sexe, seront surpris de se reconnaître dans les portraits que je ferai du sexe neutre, je veux dire de celui qui n’a ni les vertus du vôtre, ni les aimables qualités du mien [c’est une femme qui parle]. Ce qui me flatte le plus dans mon projet, c’est qu’il est neuf et original. » Jacques Vincent Delacroix, Peinture des mœurs du siècle (1777), « Conjecture pour un troisième sexe », tome I, pages 340-343.
" Enlevons la mention « sexe » de l’état-civil "
Le Monde.fr | 06.11.2015 à 15h45
En France, on peut désormais porter la mention « sexe neutre » sur son état civil [jugement du tribunal de grande instance (TGI) de Tours du 20 août 2015, mais le parquet a fait appel]. En admettant une troisième catégorie, l’état-civil se trouve assoupli, dans le même temps qu’il se prête à une forme d’essentialisation de ce sexe qu’on ne tardera pas à appeler « troisième ». L’apparition de cette catégorie naturalise en effet la différence : comme il y a des hommes et des femmes, il y a aussi, dans notre espèce, des « neutres ».
Mais la formule est ambiguë. D’une part, elle évoque une terminologie d’ordinaire appliquée aux abeilles et aux fourmis chez qui les ouvrières sont « neutres », c’est-à-dire stériles. Or, il n’est en rien nécessaire que la qualité de « neutre » chez les humains emporte avec elle la stérilité. D’autre part, et l’historienne Laure Murat l’a montré, la formule « troisième sexe » se prête à une double lecture : si elle conforte les identités désireuses d’échapper à l’alternative entre féminin et masculin, elle stigmatise aussi des anatomies et sexualités qui se trouvent par là étiquetées et marginalisées.
Stigmatisation Ainsi, si le marquage du sexe « neutre » rend dicibles des existences qui étaient niées par le schéma du sexe binaire, il risque fort de devenir une catégorie fourre-tout, qui rassemblera des individus divers en les rendant repérables à leurs concitoyens. Surtout, la décision du TGI de Tours, bien loin de détacher l’état-civil de l’anatomie, renforce ce lien : en assouplissant le sexe d’état-civil (non pas deux, mais trois catégories), il s’agit de le rendre plus exact et d’arrimer plus solidement l’état-civil aux parties génitales. Selon le mot de Benjamin Pitcho et Mila Petkova, les avocats du plaignant, il s’agissait de « mettre en accord le droit avec la nature » ou « transcrire dans le droit la réalité biologique ».
Mais quelle réalité ce sexe « neutre » recouvre-t-il ? Autant une anatomie « mâle » ou « femelle » se laisse décrire selon une forme « typique », autant il n’y a pas de représentation « type » de ce que peut être le « sexe neutre ». La catégorie juridique « neutre » vient donc plutôt décrire un sexe indéterminé et indéterminable, inassignable à aucun des deux pôles typiques mâle et femelle. Plutôt que de sexe « neutre », il faudrait parler de sexe « neutralisé ». Mais en ce cas, pourquoi la catégorie « sexe » serait-elle neutralisée pour certains individus et maintenue pour les autres ? Si le sexe est une catégorie caduque et dont l’état-civil peut se passer, c’est l’ensemble de la population que cette mesure doit concerner. L’État n’a que faire de l’anatomie génitale des personnes : sexus nullus pour tous !Thierry Hoquet, philosophe, Université de Lyon, auteur de Sexus Nullus ou l’égalité (éditions iXe, 176 p., 17 €) ; Frank Cézilly, biologiste, Université de Bourgogne, auteur de De mâle en père : à la recherche de l’instinct paternel (Buchet Chastel, 2014).http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/11/06/abolissons-la-categorie-du-sexe-pour-tous_4804687_3232.html#UvL5ZVKo567ybSt1.99
Benjamin Pierret : « Agenre : Se dit d'une personne qui ne s'identifie pas à un genre en particulier. Elle n'est pas nécessairement mal à l'aise dans le corps dans lequel elle est née, mais ne cherche pas à se définir comme un homme ou une femme. Tagath, dans un texte explicatif publié sur le site Asexualité-s, se définit comme suit : "Je ne suis ni un homme, ni une femme, ni entre les deux." On parle également de "genre neutre". Tandis que la non-binaire peut se trouver n'importe où sur la ligne horizontale évoquée précédemment, la personne agenre ne se situe même pas sur ce spectre.
De genre fluide : Lorsque le genre peut varier de masculin à féminin. C'est le cas d'Anna, qui s'est confiée au Quatre heures dans un article consacré au genre fluide, explique les fluctuations de son identité de genre : "J’ai des périodes, très rares, où je suis clairement une fille et des périodes où je suis plus ou moins un garçon. Mais le plus souvent, je suis de genre neutre." »
" Le lexique du genre : de "transgenre" à '"fluide", d'autres réalités à saisir ", RTL.fr, 21 mars 2017.
Paris : Le Seuil, 2021
NICOMÈDE
« Tels on a vu Thibouville et Villars,
Imitateurs du premier des Césars,
Tout enflammés du feu qui les possède,
Tête baissée attendre un Nicomède ;
Et seconder, par de fréquents écarts,
Les vaillants coups de leurs laquais picards. »
Voltaire, La Pucelle, variante du chant XXI.
NON-CONFORMISME, NON-CONFORMISTE, NON-CONFORMITÉ
Ces
termes proviennent du vocabulaire religieux anglais, dans lequel
ils exprimaient la non-appartenance à l’Église anglicane. À la fin du XVIIe siècle, le linguiste Gilles Ménage leur donna un sens sexuel. La comparaison de l’orientation
sexuelle à l'adhésion à une religion était aussi présente dans l’expression « hérétique
en fait d’amour », ainsi que dans les connotations des termes culte, ordre, rite
ou secte. Cela faisait de l’homosexualité un élément de la personnalité,
comme nous dirions en vocabulaire juridique contemporain.
« Marc Antoine] Muret fut ensuite à Rome, où il fut fait citoyen romain : ce qui donna occasion à Bèze de faire contre lui une épigramme où il dit que Muret, pour le crime de non-conformité, fut chassé de France, et ensuite de Venise, et que pour ce même crime il fut fait à Rome citoyen romain. […] Les Allemands n’accusaient Monseigneur de La Case que d’avoir fait le Capitolo del Forno, mais un transfuge qui était parmi eux prétendait que l’amour des non-conformistes était loué dans ce poème. »
Gilles Ménage, L’Anti-Baillet, 1688, tome I, page 319 et tome II, page 104.
« Non-conformité :
Quelques-uns appellent en badinant l’amour des garçons le péché de non-conformité.
Mr Ménage s’est servi de cette expression pour parler plus honnêtement de cette
débauche. »
« Il
[le pape Jules II] avait aimé le vin et les femmes ; et on l’accuse même
d’avoir été non-conformiste. […] On me passera ce mot, quand on saura que le péché contre nature
s’appelle le péché de non-conformité. Mr Ménage s'est servi de cette expression dans l'Anti-Baillet. »
Pierre
Bayle, Dictionnaire Historique et Critique, 1730, pages 872-873, article « Jules II
« et note M à cet article.
« Non-conformiste :
On dit dans un sens obscène qu’en amour les Italiens sont non-conformistes. »
Dictionnaire
Universel des pères jésuites de
Trévoux (1704). L’édition de 1771 tenait compte des changements survenus,
mettant alors : « Non-conformiste en amour signifie celui qui
pratique l’amour antiphysique. Voyez sodomiste. » Ce qui fit dire à l'écrivain Alfred
Jarry, en 1902 : « Les pères de Trévoux ont élucubré onctueusement
cette formule : le non-conformisme en amour. »
La
comparaison de l'orientation sexuelle à une religion, suggérée ici, l'était
aussi par l'expression « hérétique en fait d'amour », et par les termes confrérie,
culte, ordre, rite ou secte, rencontrés à diverses
époques. En 1724, l'avocat Mathieu Marais, décidément bavard sur les amours de
même sexe, écrivait au magistrat Bouhier :
« Si
vous achetez Sauval [H. Sauval, Amours des Rois de France sous plusieurs races],
il faut avoir l’addition. Il n’a pas manqué de parler du maréchal de Rais parmi
les non-conformistes. Et il dit que, sous le règne de Philippe de Valois
[en 1333], deux clercs accusèrent Durant, procureur, d’avoir fait avec eux le
péché pour lequel le maréchal de Rais fut brûlé. »
Mathieu
Marais, lettre au président Bouhier, 11 mars 1725.
« Je
ne sais si vous avez entendu parler de la secte des Non-Conformistes qui
s’est élevée en Hollande. Pour épargner le bois qui est cher en ce pays-là, on
les mets deux à deux dans des sacs et on les jette à la mer ; il y en a
déjà huit ou neuf cents d’expédiés. J’ai vu une lettre de [Jean-Baptiste]
Rousseau sur cette punition, où il dit qu’il n’y aura bientôt plus en Hollande
que des femmes et des grenouilles. »
Mathieu
Marais, lettre au président Bouhier, 20 juillet 1730. Selon les Mémoires
du maréchal de Richelieu, ces exécutions firent une forte impression sur
l’esprit du roi Louis XV, alors âge de 20 ans. Les chiffres réels sont
inférieurs : soixante exécutions et une centaine de bannissements pour les
deux années 1730-1731.
Mathieu
Marais ayant mentionné une loi de Vintimille sur ceux qui pèchent contre
nature, il répondit ainsi à une demande de précision de la part du président
Bouhier :
« Je
ne connais la loi de Vintimille que par la copie qu’en a envoyée
[Jean-Baptiste] Rousseau avec sa lettre. Il faudrait savoir de lui où il l’a
prise, mais je n’ai et ne veux avoir de commerce avec lui. Je lui ferai écrire
par M. de Lasseré, qui a reçu cette lettre de non-conformité. »
Lettre
du 3 août 1730.
Le
marquis René-Louis d’Argenson disait dans son Journal, au sujet d’un
certain de Vilaines, influent dans le parti de la manchette :
«
— Le devoir et l'honnêteté m'ont contraint, ce matin, à aller à une lieue de
chez moi rendre une visite à M. le marquis de Vilaines, quelques maisons après
la barrière de Vaugirard.
Vilaines m'était venu voir le premier, conduit par le sieur G., et il était question des affaires de Bachelier et de Hogguer. Il me fit un compliment léger, cavalier et éloquent, où ma réputation entrait honorablement pour texte. Ce personnage est par sa nature porté à l'intrigue, utile à ses amis, et le fond de cette vue est un goût naturel de se mêler d'intrigues de cour. Il est célèbre dans l"ordre de la Manchette. Ce désordre de jeunesse porte à l'amitié et conduit au cœur tendre pour ses amis, quoique le désordre y cesse avec les violentes arsées (sic) [érections] qui font le b...... [bougre.] Celui-ci se trouve grand ami du cardinal de Tencin, que les jésuites lui ont donné pour ami, et il le sert avec jugement, selon le temps. [...] Il [le cardinal de Tencin] se sert de gens tous désavouables, et tel est de Vilaines jouant un grand rôle dans le parti de la Manchette, ayant vu Courcillon, Deschauffours et même Chausson. Il est le maître de quelques jeunes gens, secrets sectateurs de cette non-conformité, il est bien reçu aux Jésuites et commande à quantité d’évêques ; il va dicter et recevoir des dictées de politique chez la de Tencin, sœur du cardinal, il a de l'esprit, ce qui paraît par une grande facilité à parler de toutes sortes de choses, depuis la politique jusqu'aux marionnettes. Il est homme du monde, il y a toujours été reçu sur cette universalité, et comme homme de bonne compagnie. Ainsi il joint à ses amis de parti quantité de vieux amis, de tous partis indifférents. Il a servi, il a des procès, il est garçon commode, enfin il est dévot, car tous ces pauvres bougres meurent le c. [cul] dans un bénitier. »
Vilaines m'était venu voir le premier, conduit par le sieur G., et il était question des affaires de Bachelier et de Hogguer. Il me fit un compliment léger, cavalier et éloquent, où ma réputation entrait honorablement pour texte. Ce personnage est par sa nature porté à l'intrigue, utile à ses amis, et le fond de cette vue est un goût naturel de se mêler d'intrigues de cour. Il est célèbre dans l"ordre de la Manchette. Ce désordre de jeunesse porte à l'amitié et conduit au cœur tendre pour ses amis, quoique le désordre y cesse avec les violentes arsées (sic) [érections] qui font le b...... [bougre.] Celui-ci se trouve grand ami du cardinal de Tencin, que les jésuites lui ont donné pour ami, et il le sert avec jugement, selon le temps. [...] Il [le cardinal de Tencin] se sert de gens tous désavouables, et tel est de Vilaines jouant un grand rôle dans le parti de la Manchette, ayant vu Courcillon, Deschauffours et même Chausson. Il est le maître de quelques jeunes gens, secrets sectateurs de cette non-conformité, il est bien reçu aux Jésuites et commande à quantité d’évêques ; il va dicter et recevoir des dictées de politique chez la de Tencin, sœur du cardinal, il a de l'esprit, ce qui paraît par une grande facilité à parler de toutes sortes de choses, depuis la politique jusqu'aux marionnettes. Il est homme du monde, il y a toujours été reçu sur cette universalité, et comme homme de bonne compagnie. Ainsi il joint à ses amis de parti quantité de vieux amis, de tous partis indifférents. Il a servi, il a des procès, il est garçon commode, enfin il est dévot, car tous ces pauvres bougres meurent le c. [cul] dans un bénitier. »
René-Louis d’Argenson, ami de Voltaire, Journal
et mémoires, tome 3 de l'édition de Paris : Vve Jules Renouard, 1861, à la
date du 29 mai 1740, pages 86, 87, 88-89.
« Si
la Madeleine avait eu quelque aventure galante avec le Christ ; si, aux
noces de Cana, le Christ entre deux vins, un peu non-conformiste, eût
parcouru la gorge d’une des filles de noce et les fesses de saint Jean,
incertain s’il resterait fidèle ou non à l’apôtre au menton ombragé d’un duvet
léger : vous verriez ce qu’il en serait de nos peintres, de nos poètes et
de nos statuaires. »
Denis
Diderot, Essai sur la peinture, 1765, chapitre IV.
« […]
un certain vice de non-conformité dont on l’accusait [Cambacérès]. Vice
qui, du reste, est fort ancien en France. »
Antoine Aubriet,
Vie de Cambacérès, 1824.
Note à l'édition Sanson 1826 des Académiciens de Saint-Évremond :
" On accusait fort Boisrobert du vice de non-conformité, témoin ces deux vers de Gilles Ménage, dans sa Requête des Dictionnaires [1649] :
Cet admirable patelinAimant le genre masculin. "
Auguste Du Roure, Analectabiblion, tome 2, 1837, page
20.
« Non-conformisme : […] Dans un autre sens, se dit de ceux qui ont des habitudes contre nature, qui ne se conforment pas aux lois de la nature. »
Littré, Dictionnaire …
Alfred
Delvau : « NON-CONFORMISTE. Pédéraste, qui est pour le schisme en amour. » (Dictionnaire érotique..., 1864.
« NON-CONFORMISTE. Pédéraste, ce qui est le schisme
en amour. » (Dictionnaire érotique, 2e édition).
« Prêtres
et moines non-conformistes en amour », tel était le titre d’un
ouvrage paru en 1902 aux Éditions de la Raison (collection Les Infâmes)
et qui fit l’objet de ce commentaire d’Alfred Jarry :
« Environ
cent cinquante cas de ce « non-conformisme » ecclésiastique ou
monacal sont cités, avec une érudition qui défie toute critique, puisque les
documents n’y manquent point, par M. Dubois-Desaulle. »
Revue
Blanche, 15 décembre 1902.
Dans une lettre adressée à Ramon Fernandez en 1934, André Gide s’analysait ainsi :
« Je crois fort juste de dire (ainsi que vous l’avez fort bien fait) que la non-conformité sexuelle est, pour mon œuvre, la clé première ; mais je vous sais gré tout particulièrement d’indiquer déjà, par quel glissement, par quelle invitation, après ce monstre de la chair, premier sphinx sur ma route, et des mieux dévorants, mon esprit, mis en appétit de lutte, passa outre pour s’en prendre à tous les autres sphinx du conformisme, qu’il soupçonna dès lors d’être les frères et cousins du premier. » Le Grand Robert de 1985 ne mentionne pas le sens homosexuel de non-conformisme, mais offre un exemple qui le suggère : « Le non-conformisme de Gide. »
« M. André Gide est pédéraste. Ce n'est pas le diffamer que de le dire, il s'en fait gloire. Il a écrit un petit livre (Corydon) pour s'en flatter et défendre l'uranie, et un gros bouquin (Si le grain ne meurt...) pour s'en confesser.
Je ne le lui reproche pas. Je m'en moque éperdument. Chacun prend son plaisir où il le trouve. Il me semble seulement aussi puéril d'avouer et de proclamer le goût qu'on a pour les jeunes gens qu'il me parait déplacé d'ouïr les confidences d'un érotomane déclarant n'aimer que les dames à gros derrière ou les jeunes filles aux seins inexistants.
Ce n'est pas du non-conformisme. C'est de l'exhibitionnisme... Une triste manie, sans plus.
Cependant, voici un article du réquisitoire d'André Gide contre l'U.R.S.S. (note au bas de la page 63) qu'il vient de publier et par lequel il accède pour la première fois, à soixante et un ans, aux gros tirages : " Que penser, au point de vue marxiste (sic) de celle (la loi) plus ancienne contre les homosexuels qui, les assimilant à des contre-révolutionnaires (car le non-conformisme est poursuivi jusque dans les questions sexuelles) les condamne à la déportation pour cinq ans, avec renouvellement de peine s'ils ne se trouvent pas amendés par l'exil ? "
On a le droit et peut-être le devoir de penser que ces dispositions sont bien rigoureuses. Mais on ne peut pas sous-estimer le poids dont elles ont pesé, au trébuchet de M. Gide, et la mesure dans laquelle elles ont aidé à sa déception.
Passons. Au sens propre du mot, M. André Gide est un pauvre bougre. »
" Un pauvre bougre : André Gide " Le Merle blanc siffle et persifle le samedi, N° 140, 5 décembre 1936, page 1.
« Quant à la loi dont André Gide ne sait "que penser au point de vue marxiste", qui condamne les homosexuels (car "le conformisme est poursuivi jusque dans les questions sexuelles") je me garderai bien de la juger. Je n’oublie pas que, dans les dures premières années de l’édification socialiste, il s’agit de nourrir, vêtir, loger, instruire "une immense majorité". Au surplus, j’aurais peur, si j’en discutais, d’être amené à confondre le non-conformisme et l’opposition à quelque pouvoir que ce soit, le conformisme et le soutien sans relâche à la Révolution vivante, – et, finalement, la Révolution et la pédérastie. »
André Wurmser (1899-1984), « L’URSS jugée par André Gide », Commune, janvier 1937.
NON-GAY,
NON-HÉTÉROSEXUEL, NON-LGBT
Sur le modèle de « non-juif » ; le non-gay sera-t-il bientôt le goy de
l’homosexualité ?
Existent déjà :
« Non-LGBT »
Robert
Kozérawski (ancien président de Lusogay), Bandol (Var), 14 juillet 2003.
« Le
mot holebi est pour homosexuel , lesbienne et bisexuel. Les holebis sont des
gens avec un caractère non-hétérosexuel . Ce sont des hommes qui tombent
pour des hommes, des femmes qui tombent pour des femmes ou des hommes et femmes
qui tombent autant pour des hommes que pour des femmes. Le point de vue idéal
de la société , homme - femme , fait souffrir les holebis. Des gens considèrent
les holebis, encore en ce jour-ci, comme anormaux. Pourtant ce sont des gens
normaux comme vous et nous. »
Amnesty international
(Belgique), 3 avril 2006.
NORMAL,
NORMALSEXUEL
« Ah ! les pauvres amours banales, animales,
Normales !
Gros goûts lourds ou frugales fringales,
Sans compter la sottise et des
fécondités ! »
Paul Verlaine, Ces passions … [Parallèlement].
« Nous encaguions ces cons avec leur air bonasse,
Leurs normales amours et leur morale en
toc, »
Paul Verlaine, Hombres, XI.
« Il
y a entre l’attraction homosexuelle de l’homme normal et l’attraction
homosexuelle de l’uraniste la différence qu’il y a entre la communion d’idées,
l’amitié, l’affection même et le désir, la différence qu’il y a entre l’amour
fraternel et l’amour conjugal. »
Dr
J. Crocq, « La situation sociale de l’uraniste », Compte-rendu des
travaux de la 5e session, Congrès international d’Anthopologie criminelle,
Amsterdam, septembre 1901. Article reproduit dans le Journal de Neurologie,
1901, pp. 591-596, et dans le Bulletin de la Société de Médecine d’Anvers,
août 1901, pp. 116-122.
« L’homme normal selon la société adulte
n’est aux yeux des voyous qu’un "pédé". »
Jean Monod, Les Barjots – Essai d’ethnologie des
bandes de jeunes, Paris : Julliard, 1968 ; voir II, 3, "Apprentis gangsters et
pédés".
Normalsexuel, terme dû à Benkert, est opposé à homosexuel dans
Le troisième sexe. Les homosexuels de Berlin (Hischfeld, 1908)
« L'homosexuel tend vers tous les êtres de son
sexe ; l'être soumis à une amitié charnelle tend vers son ami, et vers son ami
seul. Une passion hétérosexuelle peut très bien le remettre, à une occasion
prochaine, dans la voie que nous appelons normale. »
Remy
de Gourmont, " Dialogue des amateurs ", Mercure de France, 1er
janvier 1908.
Marcel Proust : « Un Grec du temps de Socrate, un Romain du temps d'Auguste, pouvaient être ce que l'on sait tout en restant des hommes absolument normaux, et non des hommes-femmes comme on en voit aujourd'hui. »
Sodome et Gomorrhe II, chapitre II, 1922.
« L’homme normal selon la société adulte n’est aux yeux des voyous qu’un "pédé". »
Jean Monod, Les Barjots – Essai d’ethnologie des bandes de jeunes, 1968 ; voir II, 3, "Apprentis gangsters et pédés".
O
ŒILLET
Selon Alfred Delvau, boutonnière =
« la nature de la femme, en opposition à l’anus, que MM. les pédérastes
appellent l’œillet. » (Dictionnaire érotique, 2e
édition).
ŒUVRE DES BAINS
ŒUVRE DES BAINS
Flaubert : « Tâche de ne pas trop t’emmerder, ne baise pas trop, ménage tes forces, une once de sperme perdu, c’est pire que dix livres de sang. À propos, tu me demandes si j’ai consommé l’œuvre des bains. Oui, sur un jeune gaillard gravé de la petite vérole et qui avait un énorme turban blanc. Ca m’a fait rire, voilà tout. Mais, je recommencerai. Pour qu’une expérience soit bien faite, il faut qu’elle soit réitérée ».
Lettre à Louis Bouilhet, 2 juin 1850.
ORDINAIRE
« En réfutant la faute de Mr. Saldenus j'aurais pu censurer encore avec plus de fondement l'Auteur du Turco-Papismus ; car il cite Agrippa comme ayant narré que ce Pape établit des lieux de prostitution tant pour l'impudicité sodomitique que pour l'impudicité ordinaire, et accorda la permission du péché contre nature à un Cardinal. »
Pierre Bayle, " Sixte IV ", Dictionnaire historique et critique, Basle : Jean Louis Brandmuller, 1738 [réédition de l'édition de 1730) , tome 4, page 226.
« Tant que nos besoins pécuniaires ou notre goût
pour la fouterie ordinaire nous ont fait une nécessité de nous servir de
couilles et de pines, nous avons porté une partie des désagréments sans nombre,
des incommodités inséparables du métier de putains. »
Anonyme, La Liberté, ou Mlle Raucour,
1791.
« Quelques
esprits délicats de nos jours, heurtés par le côté bassement matériel de
l’amour, par le prosaïsme des rapports journaliers, frappés de l’incomplet des
formes féminines, du manque d’esthétique de leur amitié toujours peu sûre, ont
jugé que la passion ordinaire ne pouvait jamais atteindre à ce haut
point de désintéressement où se joue l’amitié entre hommes. »
Paul
Verlaine, réponse à l’enquête sur la crise de l’amour, La Vie parisienne,
26 septembre 1891.
« Désaveu
de cette fausse sainteté dont mon dédain de la tentation ordinaire me
revêtait. »
André
Gide, Journal, "Feuillets", 1918-1919.
ORDRE, ORDRE DE LA MANCHETTE
Vers sur Deschauffour faits après son exécution en 1726 :
« L’ordre de
la manchette en lui perd son vrai père,
Aux gitons de Paris il tenait
ordinaire.
Tout le monde le pleure, et
l’église et l’épée. »
De B… [Bois] Jourdain, Mélanges
historiques, satiriques et anecdotiques, 1807, tome 2, p. 337.
« Leurs
discours ressemblent à leurs mœurs, ils ont un langage à part ; plein
d’affèterie, ils s’appellent entre eux Frères, Gitons et Ganymèdes. Ces noms
bizarres sont leurs noms d’amitié. Ils ont parmi eux un Ordre de Chevalerie
dont on ignore l’origine et les prérogatives ; ils tiennent tous à si
grand honneur de le porter, qu’il n’y a que les misérables qui ne l’aient pas,
on l’appelle Ordre de La Manchette. »
[Beauchamp],
Histoire du prince Apprius [Priapus], 1728. (les anagrammes ont été
éclaircis)
Dans
les Journal et Mémoires du marquis René-Louis d’Argenson, ami de
Voltaire, il est question, à la date du 29 mai 1740, d’un certain de Vilaines,
« célèbre dans l’ordre de la Manchette », « jouant un
grand rôle dans le parti de la Manchette » (tome 3, page 87 de l’édition
Renouard).
Une
des expressions du marquis d’Argenson a été reprise dans l’un des écrits
anonymes de la période révolutionnaire, et d’abord dans son titre, Les
Enfants de Sodome à l’Assemblée Nationale, ou Députation de l’Ordre de la
Manchette :
« Que
peut aujourd’hui l’abbé Viennet [député à la Convention, père d’un écrivain
célèbre] pour l’Ordre de la Manchette ? Rien sans doute ; mais
l’ordre lui doit beaucoup de prosélytes : c’est lui qui, par le
moyen de son théâtre bourgeois, a perverti Dumay, commis au Domaine ;
Cotte, commis d’architecte ; Mandron le jeune, tapissier ; Michu, de
la comédie italienne, lui doit son avancement dans l’Ordre. »
Les
Enfants de Sodome à l’Assemblée Nationale, ou Députation de l’Ordre de la
Manchette, 1790.
« ÊTRE
DE LA MANCHETTE. Préférer le cul au con. – L’ordre de la manchette
a précédé celui de la rosette … affaire de mode. » Alfred Delvau, Dictionnaire
érotique, 2e édition.
ORIENTATION
SEXUELLE
« Neuf associations homosexuelles et de lutte
contre le sida ont été reçues ce midi par le cabinet de la ministre de l'emploi
et de la solidarité pour évoquer la question des discriminations homosexuelles
dans le domaine du travail. La ministre de l'emploi a annoncé que le
Gouvernement présentera un amendement au projet de loi de modernisation sociale
(en discussion dès la prochaine session parlementaire) afin d'élargir la notion
de discrimination. L'article 122-45 du Code du travail sera ainsi complété et
étendu à " l'orientation sexuelle ", terme
retenu dans le Traité d'Amsterdam et la directive européenne sur la lutte
contre les discriminations dans l'emploi qui devrait être adoptée sous
Présidence française. »
Communiqué du Ministère de l’Emploi et de la
Solidarité, Paris, le 22 juin 2000.
« La Lesbian & Gay Pride Île-de-France
organise, dans le cadre du «Printemps des assoces», une conférence sur la discrimination liée à l'orientation
sexuelle, le samedi 7 avril 2001, de 10h à 18h, au Palais du Luxembourg,
dans la salle Clémenceau. »
« Dans les cas prévus par la loi, les peines encourues pour un crime ou un délit sont aggravées lorsque l'infraction est commise à raison de l'orientation sexuelle de la victime.
La
circonstance aggravante définie au premier alinéa est constituée lorsque
l'infraction est précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, utilisation
d'images ou d'objets ou actes de toute nature portant atteinte à l'honneur ou à
la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime
à raison de leur orientation sexuelle vraie ou supposée. »
Code
pénal, article 132-77 [Lois des 18 mars
2003 et 9 mars 2004]
« Est
interdite toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la
couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques,
la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute
autre opinion, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la
naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. »
Traité constitutionnel de l’Union
Européenne, 29 octobre 2004, article
II-81.
Article 10 du Traité sur l'Union européenne, version consolidée (2016) :
« Dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l'Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. »
ORTHOSEXIE, ORTHOSEXUALITÉ
« Par le mot « altersexuel », alternant avec « gai », je
désignerai l'ensemble des « personnes dont la sexualité est autre
qu'exclusivement hétérosexuelle », comme il sera expliqué. Les néologismes «
altersexualité » et « altersexophobie » économiseront de longues périphrases.
La nuance sera à peu près la même que celle qu'établissait dans les années 60
l'association Arcadie entre « homophile » et « homosexuel », ou celle qu'on
pourrait rétablir entre « pédophile » et « pédosexuel » si l'on se souciait de
propriété langagière pour ces êtres que la morale commune à tout humain
vraiment humain ne peut que reléguer dans l'enfer de la vilenie.
L'altersexualité est aussi bien une autre façon d'envisager la sexualité,
qu'une sexualité résolument respectueuse d'autrui. Pour faire pendant,
j'utiliserai le concept d'orthosexualité, décliné en orthosexie,
orthosexuel, orthosexisme, orthosexocrate et orthosexocratie,
dont les nuances apparaîtront en contexte sans qu'il soit besoin de
téléprompteur ou d'obscurs éclaircissements. »
« Altersexualité
et orthosexie », 10 juillet 2004, © Lionel LABOSSE.
OSCARISTE
Terme
forgé à la suite des procès de l’écrivain irlandais Oscar Wilde, en 1895.
« Les
oscaristes, […] une secte qui ne manquera pas de fondement. »
Ch.
Formentin, Le Jour, 2 mai 1895.
OUT, OUTER
Out :
à visage découvert. Voir coming out.
« Quand
tous les pédés seront out. »
Zoo,
1999.
Outer : Révéler
l’homosexualité d’une personnalité (Zoo, 1999).
OUTING
« Nous
ne ferons pas cet outing. Nous en avons par ailleurs informé le député
en question il y a quelques temps… Nous ne voulions pas pour autant que le
débat que nous avions lancé s’arrête avant terme. C’est pourquoi nous avons
attendu quelques jours avant de rendre cette décision publique. »
Philippe
Mangeot, président d’Act Up-Paris , Têtu, n° 33, avril 1999.
Le
député en question, porte-parole de l’UMP, puis ministre de la culture, était Renaud Donnedieu de Vabres (Le Figaro, 21 avril 2004, page 9).
« Délation,
inquisition, pratique policière, terrorisme, totalitarisme, fascisme, etc. La
presse n’aura pas manqué de vocabulaire pour dénoncer notre projet d’outing
(révélation publique de l’homosexualité d’une personne) […] Pour considérer que
l’outing peut nuire à celui qui en est l’objet, il faut
considérer soit que l’homosexualité est infâme, soit que sa révélation est
dangereuse. »
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