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mardi 6 septembre 2022

L'AMOUR GREC VU PAR LE DROIT ROMAIN



CORPUS JURIS CIVILIS (Code + Institutes + Digeste + Novelles), VIe siècle, édition 1624.  Capitulaires de Charlemagne.


CODE (529, 534),

Corpus Juris Civilis
IX, ix, 31 : " Quand un homme se donne à un époux [Cum vir nubit], tel une femme, une femme qui veut rejeter toute virilité, quand le sexe a perdu sa fonction, quand le crime est tel qu'il vaut mieux ne pas le connaître, quand Vénus a changé de nature, quand on cherche l'amour et qu'on ne le trouve pas, alors que par notre volonté les lois se dressent, qu'un glaive vengeur arme le droit, afin que les infâmes qui sont et seront accusés soient soumis à des châtiments recherchés " [la castration ? constitution de Constance et Constant en 342 ; reprise dans le Code théodosien de 438, IX, 7, 3 ; cité par Pierre Le Chantre, Duret, Charondas, Pothier et Voltaire].

Merci à Didier Fogel pour l'illustration.



THÉODOSE (vers 346/395), empereur romain,


Codex Theodosianus cum perpetuis commentariis, édition allemande XXe siècle ; traduction anglaise 1952 :
IX, vii, 3 : [repris de la loi de 342 ; cf CODE ; repris dans le Bréviaire d'Alaric II].
IX, vii, 6 : loi de l'an 390 : Tous ceux qui ont la honteuse habitude de condamner le corps d'un homme, en jouant le rôle d'une femme, à se soumettre au caprice d'un sexe étranger (car ils n'apparaissent pas différents des femmes) expieront un si grand crime dans les flammes vengeresses sous le regard du peuple [cf CODE].

THÉODOSE II (vers 401/450), empereur d'Orient,
Code Théodosien de l'an 438 [cf CODE].


DIGESTE [Pandectes] (533),

Édition 1624 ; traduction XIXe siècle ; traduction anglaise 1985 :
I, vi, 2 :Ulpien [vers 200], Devoirs du proconsul, VII : si un maître force ses esclaves à l'impudicité, à des actions infâmes, on les fera vendre.
III, i, 1, 6 : Ulpien, Édit, VI : il est interdit de postuler à celui dont le corps sert comme celui d'une femme.
XLVIII, v, loi Julia sur l'adultère, 8 : Papinien [vers 200], Adultères, II : celui qui prête sa maison pour le stupre avec un mâle : même peine que l'adultère [cf Pothier, 1752] ; a) viii, 1, 4 : Marcian : Institutes, XIV : on peut tuer pour défendre sa pudeur.


INSTITUTIONS (533),

Édition 1624 (Corpus juris civilis) ; traduction anglaise 1975 :
IV, xviii, Sur les poursuites publiques, § 4 : Loi Julia contre les adultères [à cette loi romaine de l'an -18 on adjoint la] peine de mort contre ceux qui exercent un désir exécrable avec les mâles.


NOVELLES [Authentique] (538, 559), sous Justinien

Édition 1624 (Corpus Juris Civilis) ; traduction du XIXe siècle :
Novelle 77 an 538 : De la défense faite aux hommes de commettre des crimes contre nature, et de jurer par les cheveux de Dieu, ou par quelque chose de semblable. De la défense de blasphémer en Dieu :
Chapitre I : Comme certains, saisis par une incitation diabolique, se livrent à des formes de luxure très graves et agissent contre la nature même, nous les enjoignons à être sensibles à la crainte de Dieu et au dernier jugement de Dieu, et à s'abstenir de ces luxures diaboliques et illicites afin que de tels actes impies ne leur attirent pas la juste colère de Dieu et que des villes ne périssent pas avec leurs habitants [...] Ceux qui persévèreront seront soumis aux derniers supplices.
Novelle 141 mars 559, adressée aux habitants de Constantinople :
Préface : Nous devrions nous abstenir de toutes les mauvaises actions, particulièrement ceux qui se sont perdus par cette conduite abominable et impie justement haïe de Dieu ; nous parlons du stupre des mâles, parce que beaucoup commettent, de manière scélérate, l'infamie mâle avec mâle.
Chapitre I : Nous savons par les saintes Écritures que Dieu, pour punir cette fureur qu'avaient les hommes de s'unir entre eux, a infligé un juste châtiment à ceux qui habitaient autrefois à Sodome [...] Action tellement impie et criminelle qu'elle est étrangère aux animaux eux-mêmes et que ceux qui ne s'en sont pas encore rendu coupables doivent s'en préserver pour l'avenir [...] Ceux qui ne voudront pas faire pénitence s'attireront des châtiments terribles [cité par Voltaire].

CAPITULAIRES DES ROIS DES FRANCS
Monumenta Germanica Historica ; Baluze 1780 :
Charlemagne roi, année 789, 1er capitulaire, article 48 : pénitence dure et stricte pour ceux qui pèchent contre la nature avec des quadrupèdes ou des mâles [d'après le concile d'Ancyre ; cf Pat. Lat. 97, col. 712D ; repris par Régino de Prüm]
Charlemagne empereur, année 802, 1er capitulaire, art. 17 : il y a des moines sodomites ; art. 38 : conjonctions illicites et incestueuses ; ceux qui ne veulent pas se corriger seront bannis.
Charlemagne empereur, année 803, 8ème capitulaire : adultère, fornication, luxures sodomitiques et inceste comportent la même peine que le sacrilège [la mort].

GRATIEN (début XIIe siècle), théologien italien et premier canoniste,

Décret [Concorde des canons discordants], Patrologia Latina 187 ; A. Friedberg, éditeur, Corpus Juris Canonici, tome 1, 2e partie :
Causa xxxii : quest. vii, cap. xii : cite Ambroise, Abraham ; xiii : cite Augustin, Confessions ; xiv : l'usage contre nature est pire que la fornication ou l'adultère ; cite Paul, Romains ; [la référence contra Jovinianum est erronée].
Causa xxxiii : quest. ii, cap. xi : usage contre nature more sodomitico, sept ans de pénitence.


GRÉGOIRE IX (vers 1150/1241), pape en 1227,

On lui doit cette forte pensée : " Ainsi, Dieu choisit la France de préférence à toutes les autres nations de la terre pour la protection de la foi catholique et pour la défense de la liberté religieuse. Pour ce motif, le royaume de France est le royaume de Dieu ; les ennemis de la France sont les ennemis du Christ. De même qu'autrefois la tribu de Juda reçut d'en-haut une bénédiction toute spéciale parmi les autres fils du patriarche Jacob ; de même le Royaume de France est au-dessus de tous les autres peuples, couronné par Dieu lui-même de prérogatives extraordinaires. La tribu de Juda était la figure anticipée du royaume de France. " (Lettre au roi Saint-Louis [1214-1270], 21 octobre 1239).

Décrétales, Corpus Juris Canonici, tome 2 :



III, i, 13 : les clercs doivent particulièrement éviter le vice qui a attiré la colère de Dieu.
V, xxxi, 4 : cite le canon 11 du concile de Latran III (1179) : incontinence contre nature pour laquelle cinq villes furent brûlées : chez les clercs, punie par l'exclusion du clergé ou la réclusion dans un couvent [c'est la peine appliquée à Arnaud de Vernioles en 1324] ; chez les laïcs, par l'excommunication et le rejet de la compagnie des fidèles." Cf CONCILES.


Et par un professeur de droit romain :

Paul Gide (1832-1880), père d'André :
  « Un amour sans nom, ou plutôt un vice infâme, était honoré dans toute la Grèce comme une vertu. On peut en voir la preuve dans tous les philosophes grecs, depuis Solon jusqu'à Plutarque : il me répugne de citer les textes et de m'arrêter sur un sujet si odieux. Il faut le dire à la honte de la Grèce : sa corruption était telle que les Romains, tout dégénérés qu'ils étaient eux-mêmes, en eurent horreur ; jamais, même au plus bas degré de leur décadence ils n'arrivèrent à méconnaître à ce point les sentiments de la nature ; s'ils s'abandonnèrent, eux aussi, au plus honteux des vices, du moins ce ne fut pas avec l'assentiment et les louanges de leurs philosophes et de leurs législateurs. »


... ce ne fut pas avec l'assentiment et les louanges de leurs
philosophes et de leurs législateurs. " Texte de 1867, inchangé en 1885.
 

Étude sur la condition privée de la femme dans le droit ancien et moderne..., Paris : Durand et Pedone-Lauriel, 1867 ; réédition Paris : L Larose et Forcel, 1885, chapitre III, " Grèce ", pages 76-77 de l'édition de 1867, pages 70-71 de l'édition de 1885 ; Paul Gide fut professeur agrégé de droit romain à la Faculté de droit de Paris-Panthéon.


dimanche 4 septembre 2022

SODOME CHEZ GRÉGOIRE LE GRAND, HINCMAR DE REIMS, PIERRE DAMIEN, ALAIN DE LILLE, PIERRE LE CHANTRE, ALBERT LE GRAND, THOMAS D'AQUIN ET ALII, ET DANS LES CONCILES

Voir aussi

LA BIBLE ET L'HOMOSEXUALITÉ MASCULINE 

CLÉMENT D'ALEXANDRIE ET ALII (Textes chrétiens de l'Antiquité)

A / Mes notes de lecture sur ces textes chrétiens du Moyen Âge.
B/ Appendice sur le " vice étranger ".



A / PÉNITENTIEL DU SYNODE DU BOSQUET DE LA VICTOIRE (1ère moitié VIe siècle)
BnF mss lat. 3182 ; Ludwig Bieler, Irish penitentials (1963) ; Louis Crompton, Homosexuality & civilization, (2003) :
8 : crime masculin à la sodomite : 4 ans de pénitence ; entre les cuisses, 3 ans ; avec la main d'un autre ou la sienne, 2 ans.
9 : ceci pour un homme qui a fait vœu de perfection ; s'il n'a pas encore fait vœu, déduire un an.

Synode d'Eauze (Gers actuel), 551 :
canon 1 du Synode : relation interdites avec d'autres, hommes ou femmes ; exclusion de la communion, large pénitence.

Concile de Tours II567, collection Sources Chrétiennes (Canons des conciles mérovingiens) :
canon 15 : certains laïques commettant diverses formes d'adultère soupçonnent chez autrui ce dont ils ont personnellement l'expérience ;
qu'aucun prêtre ni moine ne se permette d'admettre un autre dans son propre lit. [cf Benoît de  Nursie (vers 480/vers 547), fondateur de l'ordre bénédictin, Règle, coll. SC : XXII " Comment les moines dormiront " : 1 : chacun un lit ; 4 : une lampe brûlera continuellement ; 7 : les frères adolescents n'auront pas leurs lits les uns près des autres, mais mêlés à ceux des anciens.]

GRÉGOIRE Ier dit GRÉGOIRE LE GRAND (Rome, vers 540 / Rome, 604), écrivain ecclésiastique, pape en 590, docteur de l'Église,

Dialogues : Patrologia Latina, volume 77 ; Sources chrétiennes :
IV, 37 :
Genèse, XIX, 24 ; les Sodomites avaient brûlé d'un amour illicite ; peine de mort par le feu et le soufre.

Lettres : Patrologia Latina, volume 77  ; Monumenta Germanica Historica  ; édition 1982 :
Livre X, lettre iv selon la table des matières :
lettre à Savinus de septembre-octobre 599 : entaché de ce crime de sodomie [sodomiae illum scelere maculatum ; première apparition connue (trois occurrences) du terme sodomia cité par A. Blaise et Mark. D. Jordan].

Morales sur Job : Patrologia Latina, volume 75 ; Sources chrétiennes (incomplet)
2a, VI, chapitre xxii, § 38 " Sens moral " : Sodomites dans la maison de Lot.
3a, XIV, xix, § 23 :
c'est pour s'être embrasée des désirs pervers venus d'une chair fétide que Sodome a mérité de périr à la fois par le feu et par le soufre [Genèse, XIX, 24].

Règles pastorales : Patrologia Latina 77  ; Sources chrétiennes :
III, 27 : Loth : fuir de Sodome en flammes, c’est refuser les feux illicites de la chair [cité par Mark. D. Jordan] ; 31.

COLOMBAN (vers 543/615), moine d'origine irlandaise installé en Gaule,
Pénitenciel, Migne éd., Patrologia Latina, volume 80 :
§ 3 : 10 ans de jeune pour un péché sodomitique [sicut Sodomitae fecerunt] commis par un moine ; ne partagera plus jamais une chambre avec une personne de son sexe.
§ 29 : comme firent les Sodomites, c'est-à-dire le coït avec un mâle : 7 ans de jeune pour un laïc ; 3 ans avec pain, eau, sel, légumes secs ; 4 ans sans vin ni viande.

XVIe Concile de Tolède, 693J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XII, c. 71 ; MGH Leges I, 1, p. 483 ; Patrologia Latina 84, col. 538A-D.
Canon 3 : à la manière des peuples sodomitiques ; cite Isaïe, I, 9 ; opération sodomitique : des mâles exercent une turpitude contre nature avec des mâles ; dégradation et exil perpétuel pour les clercs ; excommunication et exil pour les autres.




BÈDE LE VÉNÉRABLE (vers 672/735), moine anglais,
Pénitentiel, Migne éd., Patrologia Latina 94 :
§§ 19-22 : si sodomites, 7 ans [de pénitence] ; entre les cuisses : trois fois 40 jours.
§§ 30-32 : entre les cuisses, entre enfants : 100 jours.

GRÉGOIRE III (fin VIIe siècle/741), évêque d'origine phénicienne, pape en 731,
Pénitenciel, Patrologia Latina 89 :
XXI : crime sodomitique : dix ans de pénitence suivant l'ancienne constitution ; 50 jours pour les enfants.

PÉNITENTIEL ROMAIN (vers 803),
Migne éd., Patrologia Latina 105, col. 697D :
Si un clerc fornique comme le firent les sodomites, 10 ans de pénitence dont 3 au pain et à l'eau [cité par Halitgaire]

Concile de Paris VI, 829, Mansi XIV, cc. 560-561 ; MGH Leges 3, Concilia 2, 2, pages 634-635, 669 : canons 34 et 69 : gravité du péché contre nature ; peine de mort selon Lévitique XX ; confession et pénitence ; référence au canon 16 d'Ancyre.

RABAN MAUR (780/856), abbé puis archevêque de Mayence,
PénitentielPatrologia Latina 110 :
XXV ; XXXII : fornication irrationnelle avec des mâles ; canon 15 du concile d'Ancyre.

HINCMAR DE REIMS (vers 806 / 882), archevêque de Reims en 845 et écrivain politique,
Patrologia Latina 125 :
Sur le divorce du roi Lothaire, Interrogation XXII : discussion du crime de Sodome en relation avec l'inceste ; concubitu masculi Sodomitano ; pecatum Sodomitanum ; cite Lévitique, XX, 13 ; Romains, I, 26-27 ; I Corinthiens, VI ; Éphésiens, IV ; Ambroise, De Abrahamo ; Augustin ; Grégoire le Grand.

Concile de Aix-la-Chapelle, 860, MGH , Capitularia, 2, 468 :
canon 18 : fornicari contra naturam in proprio genere.

Concile de Trosly (Oise actuelle), 909J.D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XVIIIA, 306 :
canon 15 : les pollutions avec des mâles ou des animaux de basse cour ont provoqué la colère du bon Dieu.

La période Xe-XIIIe siècles est parfois appelée Première Renaissance ou Âge d'or...

BURCHARD DE WORMS (965/1025), évêque allemand,
Décret ou CorrecteurPatrologia Latina 140 :
XVII " La fornication " : 33 : pénitence dure et stricte pour ceux qui pèchent contre nature avec des mâles [repris du Pénitentiel Romain] ; 34 : ceux qui forniquent comme les Sodomites [repris du pénitentiel de Théodore de Cantorbéry et de la Discipline de Regino de Prüm] ;
35 : clercs ou moines qui poursuivent les mâles [masculorum insectatores ; cf Regino de Prüm] ; 36 ; 37 ;
39 : évêques qui font comme les Sodomites : 10 ans de pénitence.
XIX "La pénitence" : 5 : avec un mâle, entre les cuisses : 40 jours au pain et à l'eau ; fornication contre nature avec des mâles ou des animaux, jument, vache, ânesse : si pas d'épouse sur laquelle décharger sa libido, 80 jours de pénitence ; si marié, 10 ans ; si c'est devenu une habitude, 15 ans.
XX, 120-123 [peines pas plus légères que dans les premiers codes celtiques]

Concile de Reims, 1049, J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XIX, cc. 736-745 :
canon 12 : excommunication des sodomites.

PIERRE DAMIEN (Ravenne, vers 1007 / Faenza, 1072), ermite italien puis cardinal et réformateur de l'Église, Docteur de l'Église (1828),

Livre de Gomorrhe [Liber Gomorrhianus, lettre 31, adressée au pape Léon IX, vers 1051], Patrologia Latina, volume 145, cc. 161-190 ; traduction anglaise 1982 ; texte et traduction française aux éditions du Cerf en 2021 :

Pierre Jurieu, Préjugés légitimes contre le Papisme, 1685.
Première partie, chapitre XXVI, page 319.


Publié en 2021. (Vers 1021).

Préface : Le vice contre nature se répand comme un cancer [vitium igitur contra naturam velut cancer ita serpit].
I : 
quadruplicité du péché contre nature : sur soi-même, avec les mains d'autres, entre les cuisses, en consommant l'acte contre nature : degrés de plus en plus graves [cf  Pénitentiel du Synode...].
IV : cite Paul, Épître aux Éphésiens, V et 1ère à Timothée, I [masculorum concubitoribus].
V : cite Paul, Romains, I [masculi in masculos turpitudinem operantes] et Genèse, XIX.
VI : tomber dans un désir honteux me semble plus tolérable avec du bétail qu’avec un mâle [Ut mihi videtur, tolerabilius est cum pecude, quam cum viro in luxuriae flagitium labi].
VII : les prêtres coupables se confessent les uns aux autres.
XIII : De ceux qui forniquent de manière irrationnele, soit ceux qui se mêlent au bétail ou qui sont pollués avec des mâles : citation du canon 16 du concile d’Ancyre [314].
XIV : cite le canon 17 du concile d’Ancyre [314] ; contre la loi de la nature et l'ordre de la raison humaine ; quand un mâle se précipite sur un mâle pour commettre une impureté, ce n'est pas un désir naturel de la chair, mais une impulsion diabolique [non est ille naturalis impetus carnis, sed tantum diabolicae stimulus impulsionis].
XV : clercs ou moines séducteurs de mâles [De clericis, vel monachis, si fuerint masculorum insectatores].
XVI : Ce vice apporte la mort du corps et l'extinction de la lumière de l'esprit ; chasse la vérité de l'esprit et le dirige vers l'erreur [cité par John Boswell].
XXV : si le blasphème est le pire, je ne sais pas en quoi la sodomie [sodomia] serait meilleure [si pessima est blasphemia, nescio, in quo sit melior sodomia ; cité par Mark. D. Jordan].
XXVI, Conclusion :
Une fois examinées avec diligence les quatre diversités de ce vice que nous avons énumérées plus haut, que votre béatitude daigne, par une décrétale, nous enseigner de laquelle d’entre elles le coupable est exclu irrévocablement de l’ordre ecclésiastique ; à quel prélat, discretionis intuitu, et en appelant à la miséricorde, cette fonction peut être accordée. Pour laquelle des diversités, et pour combien de chutes est-il licite de persévérer dans la dignité ecclésiastique. Comment doit se souiller quelqu’un et combien de fois, pour qu’il soit contraint par la nécessité de quitter sa fonction ?



YVES DE CHARTRES (vers 1040/1116), canoniste,
DécretsPatrologia Latina 161 :
IX, 92 : contre ceux qui forniquent comme les Sodomites ; cite le Pénitentiel de Théodore de Cantorbéry ;

Concile de Londres, 1102 : J.D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XX, col. 1152 :
canon 28 : ceux qui commettent le péché de sodomie [sodomitium flagitium facientes] sont frappés d'excommunication.

Concile de Naplouse, 1120, J.D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XXI, c. 264 :
canon 8 : brûler l'adulte sodomitique, aussi bien l'agent que le patient. [Première mention de la peine du feu dans ces textes].
canon 9 : l'enfant non consentant doit faire pénitence.

ALAIN DE LILLE (1120-1202), théologien et écrivain,

La Complainte de la nature, Patrologia Latina 210 ; traduction anglaise 1908 :
I : Le sexe de nature active dégénère en nature passive ; l'homme devient femme, l'amour le rend hermaphrodite ; à la fois prédicat et sujet, il pousse les lois de la grammaire trop loin [cf  DFHM, entrée " troisième sexe "].
IV : Parmi les hommes qui emploient la grammaire de Vénus, certains embrassent le masculin, d'autres le féminin, et d'autres les deux [cité par John Boswell] ; hommes d'un genre hétéroclite ; Jupiter a enlevé l'adolescent Ganymède.


PIERRE LE CHANTRE (CANTOR) (vers 1125/1197), chanoine et théologien originaire de Reims,
Verbum Abbreviatum, Patrologia. Latina 205, colonnes 333-335 :
CXXXVIII Du vice sodomitique : le vice sodomitique et l'homicide sont des péchés semblables ; les sodomites et les homicides sont adversaires de Dieu et du genre humain [cité par John Boswell] ; il n'y aura pas de rapport [consortium] de l'homme avec l'homme ou de la femme avec la femme, mais de l'homme avec la femme, et contrario ; cite Genèse, I et XVIII, Lévitique, XVIII, Paul, Romains, la loi romaine de 342 [cf CODE] et Grégoire le Grand.

Concile de Latran III (concile œcuménique), 1179, J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XXII, colonnes 224-225 :
canon 11 : incontinence contre nature pour laquelle cinq villes furent brûlées : chez les clercs, punie par l'exclusion du clergé ou la réclusion dans un couvent [c'est la peine appliquée à Arnaud de Vernioles en 1324] ;
chez les laïcs, par l'excommunication et le rejet de la compagnie des fidèles.


GRÉGOIRE IX (vers 1150/1241), pape en 1227,
Décrétales, Corpus Juris Canonici, tome 2 :
III, i, 13 : les clercs doivent particulièrement éviter le vice qui a attiré la colère de Dieu.
V, xxxi, 4 : cite le canon 11 du concile de Latran III.

Concile de Paris, 1212, J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, Florence, XXII, col. 831 :
canon II, 21 : deux moines ou deux chanoines ne doivent jamais coucher dans le même lit ; pour l'incontinence contre nature, qui a fait brûler cinq villes, suivre le concile de Latran III ; pénitence dans un monastère.


canon IV, 20 : ne pas nommer ce crime [flagitium ; cf Augustin, Doctrine chrétienne] qui déshonore la nature ;


Canon IV, 21 : les fautes charnelles contre nature, commises par toute personne âgée de plus de 5 ans, surtout par des clercs, seront punies très sévèrement, conformément au canon 11 du concile de Latran III.



ALBERT LE GRAND (avant 1200, possiblement en 1193 en Bavière / Cologne, 1280),  dominicain, théologien et philosophe allemand (Docteur universel), premier interprète scolastique d'Aristote, eut Thomas d'Aquin comme élève à Paris et à Cologne,

Commentaire de Luc [Opera omnia, 1895, tome 23] :
XVII, 29 : cite Genèse XIII et XIX ; quatre choses sont détestables dans ce péché [cité par John Boswell] ; son ardeur, qui renverse l'ordre de la nature ; cite Paul, Romains ; sa puanteur, qui monte , ce vice abominable est plus répandu chez les grands que chez les humbles [contredit Salvien et Hildebert de Lavardin] ; son adhérence : ceux qui en sont atteints ne peuvent presque jamais s'en délivrer ; cite Genèse XIV, 10 : "la vallée était pleine de puits de bitume" ; quarto, c'est une maladie [morbus] contagieuse qui passe de l'un à l'autre ; cite Genèse, XIX, 17. : "ne t'arrête nulle part dans la région, sauve-toi à la montagne" [pour échapper à la contagion].

Somme théologique [Opera omnia, 1895, tome 33] :
XVIII, question 122 : examen de divers péchés : fornication, adultère, stupre, prostitution, sacrilège, inceste, sodomie ; la sodomie [sodomia]  est péché contre nature, de mâle avec mâle ou de femme avec femme [cité par John Boswell] ; cite Paul, Romains, I, 26-27 ; péché maximum car contre la grâce, la raison et la nature.


THOMAS D'AQUIN (Aquino, 1227 / abbaye de Fossanova, 1274), dominicain, Docteur angélique, élève d'Albert le Grand,

Summa contra Gentiles, III, chapitre xxii, § 9 [commenté par Adriano Oliva] : condamnation de la sodomie ; cite Genèse I, 28, Lévitique XVIII, 22-23, et I Corinthiens VI, 10.

Somme théologique, Desclée de Brouwer :

Ia-IIae, Le plaisir, question 31, article 7 [commenté par Adriano Oliva] : Altération de l'âme de ceux qui par coutume trouvent du plaisir à s'unir sexuellement entre hommes [corruptio ... ex parte animae... coitus masculorum].
Cf  Sextus Empiricus, Contre les savants [Adversus Mathematicos, IX-X], BT, LCL ; traduction 1948 :
I, 187 : " Éros est une passion psychique ".
Et Dr A. Moll, " Pour comprendre la pulsion homosexuelle, il faut considérer la pulsion sexuelle [...] comme une fonction psychique. " La Sensation sexuelle contraire, VIII, 1891 ; idée présente chez Freud].

IIa-IIae, La religion, question 94, article 3 : le péché contre nature est le châtiment du péché d'idolâtrie.

La tempérance, question 142, article 4 : les vices qui sortent de la nature semblent se réduire au genre de l'intempérance, comme lorsque quelqu'un trouve du plaisir dans des rapports avec les mâles ;

Les parties de la luxure, question 154, article 11 : troisième manière du vice contre nature : lorsque l'on a des rapports sexuels avec le sexe non complémentaire [non debitum], par exemple homme avec homme ou femme avec femme ; ce qu'on appelle vice sodomitique ;
 Dans l'édition de 1463.

article 12 : cite Augustin : la luxure la plus grave est celle qui est contre nature ; le péché le plus grave est la bestialité ; après vient le vice sodomitique, où l'on ne se sert pas du sexe requis [debitus] ; après c'est le péché de celui qui n'observe pas la manière requise pour l'union charnelle.

ANONYME BELGE pseudo-AUGUSTIN (XIVe siècle),

[76] Sermons adressés aux frères du désert, traduction XIXe siècle :
XXXI : Si les Sodomites avaient fermé les yeux, ils n'auraient point vu les jeunes gens, et n'auraient pas péri.
XLVII : Profonde horreur du péché des Sodomites ; crime honteux que des mâles commettent avec d'autres mâles ; des hommes rejetant l'alliance des deux sexes qui est selon la nature ont été embrasés d'un désir brutal [animal] les uns envers les autres, l'homme commettant avec l'homme une infamie détestable ; un membre du Christ sert de putain ; fuyez les sodomites comme la mort ; et ceux qui couchent avec des garçons [puerorum concubitores].


B / VICE D'ALTÉRITÉ, VICE ÉTRANGER
Sur les Sodomites (habitants de Sodome, aujourd'hui Sedom) : quasiment tous les auteurs chrétiens.
Sur les Celtes : Aristote, Diodore de Sicile, Strabon et Athénée, .
Sur les Germains : Tacite, Sextus Empiricus, Ammien Marcellin, Procope.
Sur les Gaulois : Eusèbe de Césarée.

Sur les Perses : Hérodote, Xénophon d'Athènes, Plutarque et Sextus Empiricus ; mais opinion contraire d'Ammien Marcellin.
Sur les Crétois : Aristote, Athénée, Cornélius Népos, Élien, Maxime de Tyr, Platon, Plutarque, Servius, Sextus Empiricus, Strabon et Timée.

Sur les Grecs, du point de vue des Romains : Cicéron, Cornélius Népos, Pline l'Ancien, Pline le Jeune (Ces petits Grecs ...) et Sénèque le Jeune.

Sur les Massaliotes (habitants de Massalia, aujuourd'hui Marseille) : Plaute, Athénée.


Sur les Païens, du point de vue des Chrétiens : Aristide, Athanase d'Alexandrie, Augustin, Clément d'Alexandrie, Cyprien de Carthage, Eusèbe de Césarée, Justin, Lactance, Firmicus Maternus, Minucius Felix, Orose, Salvien, Tatien, Tertullien.
Sur les Normands et Français : l'anglais Giraldus de Cambrie.

Sur les Auvergnats... : Raoul Glaber.


Toute l'Antiquité gréco-romaine se retrouve aujourd'hui dotée d'une forte image homosexuelle. Depuis, fortes dénonciations protestantes des vices des "bougres" catholiques aux XVIe et XVIIe siècles. Stigmatisations nationalistes du "vice italien" au XVIe siècle, du "vice arabe" au XIXe siècle, du "vice allemand" par des Français aux alentours de 1900, et à la Libération (1945-1946), enfin du " vice anglo-saxon " par Mme Édith Cresson, avant qu'elle soit premier ministre, en 1991.